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Porte de la Craffe et porte de la Citadelle

et

Evolutions du périmètre de la Ville-Vieille

Les anciennes fortifications de Nancy
La Ville révélée, animation 3D de Nancy à la Renaissance
la citadelle de Nancy (Maurice Dumontier, le Pays Lorrain 1955)

Sur la naissance de Nancy, ville médiévale, du 11ème au début du 15 ème siècle

Sur l'évolution urbaine de Nancy (Ville-Vieille, Ville-Neuve)



Un peu d'histoire


Avec la tour de la Commanderie, la porte de la Craffe avec ses deux tours, est l’un des plus anciens monuments de la ville. Pour simplifier, les historiens, quoique divisés sur l’histoire de l’origine de Nancy, considèrent que le développement de la Vieille-Ville se fait schématiquement de la manière suivante :
Un château-fort entouré de marais et de prairies existe au début du 11ème siècle à l’époque des premiers ducs héréditaires Gérard d’Alsace ou Thierry le Vaillant ; les ducs habitent à l’intérieur de ce castrum situé à l’emplacement de l’Hôtel de la Monnaie et de l’ancien monastère des Dames Prêcheresses.
Le prieuré Notre-Dame est voisin et des maisons s’élèvent peu à peu autour de ce château, habitat des ducs comme Simon 1er (1115- 1139) ou Mathieu II (1220-1251), autour d’un cœur constitué de la place Saint-Epvre et de la place des Dames Prêcheresses; les historiens admettent que le domaine limité par les rues suivantes constitue l’aire du Nancy du 12ème et du début du 13ème siècle : Rue de la Source, rue de la Charité, rue du Maure-qui-Trompe ( plus précisément rue Derrière Saint-Epvre), ruelle à l’emplacement de l’ancien Hôtel d’Havré , rue des Maréchaux, rue du Bon Pays; la ville n'aboutit pas encore à la Grande-Rue.
Le plan de Claude de La Ruelle bien que plus tardif aide à la visualisation de cette partie de la Vieille-Ville de Nancy.

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Au 13ème siècle, époque des Ducs Mathieu II (1220-1251) et Ferry III (1251-1303), la ville s’étend entre la rue Saint-Michel, la rue Derrière (Jacquard), la rue du Bon-Pays, la rue des Maréchaux, et la Grande-Rue.
 Ferry III habite le "palatium antiquum" ou « Grande-Maison » au niveau de l’Hôtel de la Monnaie de Léopold ; un atelier monétaire permet alors de fabriquer des médailles en argent (espadins).

Ferry III fait une donation de son château aux Dames prêcheresses en 1298 ; elles y fondent monastère et église.

Sur le monastère des dames Prêcheresses:

Dès la fin du 13e siècle, Nancy accueille un premier établissement dominicain : il s’agit d’un monastère de femmes dont la fondation en 1298 est impulsée par le duc de Lorraine Ferry III (ca. 1240–1303) et financée en partie par la riche famille des Le Jaloux. Les religieuses s’installent dans l’ancien palais ducal (construit au 12e siècle) en cours de démolition. Elles y aménagent une église dédiée à sainte Catherine d’Alexandrie, flanquée de chapelles, un cloître, un bâtiment conventuel environné d’une cour et d’une basse- cour.
Le monastère compte alors une dizaine de religieuses, une prieure et une sous-prieure, une cellérière. Doté de revenus importants grâce à des donations constantes, le monastère s’enrichit progressivement, le recrutement des Soeurs s’oriente vers les familles de la noblesse lorraine, ce qui explique leur appellation de dames Prêcheresses. Au cours du 18e siècle (1720-1732-1746), les bâtiments, sont entièrement remaniés sous la direction successive des architectes Louis Guesnon, Nicolas Jennesson, Jean Gauthier, Nicolas Génin; Jean Lamour, serrurier et Charles Devarenne peintre interviennent .
 Fin 18ème siècle, presqu’en faillite, l’ensemble du bâtiment sert de « prison » deux ans pendant la Révolution Il est mis en vente comme bien national à la fin des années 1790, démoli et début 19ème, de nouvelles constructions sont édifiées pour y être louées.
(Clément Daynac Yves-Dominique Chassagne Groupe Facebook Nancyretro)


Nancy- Le monastère des Dames Prêcheresse

Ferry III commence la construction d’un nouveau Palais Ducal dont la réalisation sera poursuivie par Thiébaud II (1303- 1312) et Ferry IV (1312- 1328) et terminée par le Duc Raoul (1328- 1346), près de l’emplacement du Palais actuel. On remarque sur le schéma 1 ci-après le mur (H) qui allait vers la porte de la Craffe. Ce château dit du "duc Raoul" est hors les remparts; seule l'église Sainte-Catherine qui deviendra la collégiale Saint-Georges plus tard est à l'intérieur. L'emplacement du Palais Ducal que nous connaissons est alors un pré ou breuil; entre le château du Duc Raoul et le Palais actuel, il y eut le Palais de René II construit à partir de 1502 en bordure de la Grande-Rue.

schéma 1: le château du Duc Raoul


A cette époque du Duc Raoul, les « bourgets » (petits bourgs) ne sont toujours pas intégrés à la ville ; le lieu désigne le faubourg situé entre la ville, plus précisément le Prieuré Notre-Dame (Place de l’Arsenal de nos jours) et le village de Saint-Dizier (le quartier des Trois-Maisons d’aujourd’hui). 
Cette intégration des Bourgets sera réalisée au 14ème siècle, vers 1373 avec la démolition de la porte Bézuel qui, au Nord, faisait le pendant de la porte Saint-Nicolas au sud; en fait, l'urbanisation proprement dite de ce quartier date du début du 17ème siècle avec les rues du Haut-Bourgeois et du Petit- Bourgeois qu’on retrouve sur le plan de La Ruelle de 1611.

Nancy au 12ème 13éme siècle (cf)

1 église Saint-Epvre mentionnée en 1145, 3 Porte Bézuel, 4 Porte Saint-Nicolas, 5 Halles, 6 Dames Prêcheresses, 7 Palais Ducal, 8 Bourget


Aujourd'hui, vestige au niveau de la porte Bézuel


Nancy au 14-15ème siècle (à gauche) et vers 1560 (à droite) (cf)

2 Hôpital Saint-Julien,3 Chapelle Saint-Michel, 4 Etuves rue du Duc Raoul,5 Maison du Change et tribunal des Echevins (place du Chatel ou du Change), 6 Collégiale Saint-Georges, 7 porte de la Craffe, 8/9 rues du Haut et Petit Bourgeois,10 tour du Vannier, 11 grosse tour du Sud-Ouest,12 faubourg Saint-Nicolas,13 Hôpital Notre-Dame, 14 Faubourg Saint-Thiébaut.


1 boulevard de la Poterne, 2 boulevard de la Craffe, 3 bastion du Danemark, 4 arsenal, 5 bastion d'Haussonville, 6 bastion de Vaudémont, 7 Neuve-Rue (large espace dégagé)





Schéma 2: plan de la ville avec les rues de Nancy en 1508, à la mort de René II

1 Grande Tour; 2 Poterne Saint-Jean; 3 Tour de Sar; 4 Tour du Grand Bourget; 5 Porte et Tour de la Craffe; 6 Tour du Vannier; 7 Poterne derrière la Cour;
8 Porte Saint-Nicolas (alors dans l'alignement de la rue de la Boudière ( Grande Rue);
9 devant la Porte de la Craffe; 10 Eglise et prieuré Notre-Dame; 11 Cimetière Notre-Dame; 12 Eglise Saint-Epvre; 13 Place et fontaine Saint-Epvre; 14 Collégiale Saint-Michel;
15 Collégiale Saint-Georges; 16 Palais Ducal; 17 Les Cordeliers; 18 Les Dames Prêcheresses; 19 Place du Châtel ou Place des Dames; 20 La Grande Maison; 21 Hôpital Saint-Julien


Nancy 1477 par Louis Christophe lithographe

Porte d'entrée de l'ancien hôpital Saint-Julien ( voir référence 21 du plan précédent)

(document Clément Daynac - NancyRetro)

Porte de la Craffe: un bel ensemble d'architecture militaire

la porte de la Craffe depuis le Palais ducal, avant 1861 (avant modifications) et aujourd'hui

documents facebook, groupe nancyretro

Sous le règne de Jean 1er de Lorraine de la Maison d’Alsace (1346-1390), les murailles et tours faisant office de fortifications sont très simples. La porte de la Craffe relie la ville, qui intègre alors les Bourgets, au village de Saint-Dizier et plus précisément à un endroit nommé Les Bordes où étaient reclus les habitants victimes d’épidémies. Cette porte des Bordes devient alors Porte de « Craif » (mention trouvée en 1405) ou encore de la Craffe, de Graffe ou d’Escraffe. L’origine de ces noms n’est pas connue : vieux noms rappelant l’architecture, mot kraft (force) rappelant la notion de  fortification, de puissance, ou encore nom d’un personnage (Garaffa, gouverneur Napolitain),…
Les autres portes de ce système de défense qui permettent de sortir de la ville sont la porte Saint-Nicolas située à l’extrémité de la Grande rue actuelle au niveau de la place Vaudémont, et la porte Sacrée au niveau du palais ducal ; la poterne Saint- Jean ainsi que la poterne  de Sar (ou Sarette) jusqu’au 15ème sont d’autres accès possibles. Des tours sont situées à différents endroits de la muraille ….dont la Grande Tour à l’emplacement du futur bastion des Michottes, la tour de Sar (du mot « essart » ou friche probablement)  au niveau du haut de notre rue Saint-Michel. La tour du Grand Bourget et celle du Vannier sont au Nord ; peut-être y avait-il des tours du côté Est ?


Les deux grosses tours de la porte de la Craffe, aux murs épais (3m d’épaisseur), ne sont construites qu'en 1463 sous le règne de Jean II de Lorraine (1425-1470), fils de René Ier de la Maison d’Anjou, donc peu de temps avant le règne du célèbre René II de la Maison de Vaudémont (1473-1508) et juste avant la guerre contre les Bourguignons à laquelle, du reste, elles ont relativement bien résisté.

Jusqu’au début du 16ème siècle, la porte est reliée à la tour du Vannier par une muraille des fortifications primitives, assez simple, réalisée vers 1380 (schéma 3).
En 1505 la construction  d’un « boulevard » d’artillerie en terre  (terre- plein) devant la porte (schéma 2) servira à améliorer la protection de celle-ci contre l’artillerie qui faisait ses débuts ; une seconde muraille datant de l'époque de ce boulevard se dirigeait de façon oblique devant la tour du Vannier. Le « boulevard » protégeait des assaillants venant  du village de Saint-Dizier (aujourd’hui les Trois Maisons) ; ce terre-plein explique aujourd’hui l’existence d’une voûte reliant les deux façades de la porte.
Ces deux murailles et la tour du Vannier disparurent lors de la construction du bastion Le Duc fin 16ème.

Schéma 3:
les murailles primitives à l'Est de la porte de la Craffe par rapport aux futurs bastions et à la future Citadelle ainsi qu'à l'ancienne tour du Vannier; fortifications de 1380 jusqu'à la Tour du Vannier et de 1505 devant cette tour.


Après sa victoire contre Charles le Téméraire, René II fait élargir le rempart et entreprend des réparations sur la porte ainsi que sur les tours, réparations rendu nécessaires suite à cette période de guerre contre les Bourguignons. Par ailleurs, il réalise la construction de la seconde façade de la porte, de l’autre côté du « boulevard d’artillerie » ; c’est l’origine de cette façade de style renaissance reliée à la première porte et aux tours par une voûte suffisamment large pour permettre le passage des canons.

 


Sur le plan architectural on retrouve un style gothique, de grosses pierres de taille et des ouvertures étroites, des éléments en saillie (corbeaux)  en haut de l’édifice et des avant-corps (bretèches) pour la défense de la base de la porte.

Les deux tours initialement crénelées porteront au 16ème siècle une toiture ronde en poivrière donc de forme conique; des lanternes complètent l’ensemble.
Important maillon de la défense de la ville, la porte de la Craffe servira également  de prison à différentes époques du 15ème au 19ème siècle, par exemple lors de la bataille de Champigneulles en 1407 ou Charles II doit faire face au duc Louis d’Orléans et à son allié le duc de Bar qui, avec  d’autres seigneurs, attaquent le duché de Lorraine. Jusqu'en 1610 (Henri II : 1608-1624), la porte de la Craffe est la porte d'honneur des Ducs de Lorraine lors de leur accession au trône.

Plus tard, avec la destruction des remparts de Nancy, la porte perdra son rôle défensif. Elle reste néanmoins, avec la porte de la citadelle, le passage obligé pour la sortie nord de la ville.



Un arc en tiers-point termine la porte et la Vierge, déplacée pendant la Révolution.

On remarque les portraits curieusement casqués (végétaux, aigle, bélier) des fondateurs présumés de la porte: le Duc Jean 1er (1346-1390) et le Duc Raoul le Vaillant (1328-1346, fils de Ferry IV) près de la Vierge, le duc Charles II (1390-1441, connétable de France, fils de Jean 1er) et le duc René II (1473-1508, fils de Ferry II, comte de Vaudémont) autour de la Croix de Lorraine; ces portraits datent de 1861.
La date de 1407 est celle de la Victoire de Champigneulles et la date de 1477 celle de la bataille de Nancy.


Sous la voûte de la porte de la Craffe

Photos Agence Caillault



Jean 1er de Lorraine, fils de Raoul et de Marie de Châtillon



La façade Renaissance de la porte de la Craffe (côté Trois Maisons)

Un groupe sculpté de l’Annonciation avec l’ange et la vierge décorait cette porte Renaissance en rappel à la protection offerte par la Vierge à René II ; la Vierge de l’Annonciation était également représentée sur l’étendard du duc lors de sa victoire sur Charles le Téméraire. Cette sculpture disparaitra de la porte à la fin de 1792. On sait que René II prit plaisir à reproduire à plusieurs reprises l'image de l'Annonciation. Celle de la porte de la Craffe était au-moins la troisième. Ce groupe sculpté avec la Vierge et l'ange Gabriel est attribué à Jean Crocq qui fut actif de 1487 à 1510-1511; après la porte de la Craffe, elle fut positionnée dans l'ancienne église Saint-Epvre avant d'être exposée au Musée Lorrain où elle se trouve aujourd'hui.


Au 16ème siècle, on donne alors à la porte de la Craffe le nom de Notre-Dame, nom prêtant à confusion puis que ce même nom sera attribué à la porte de la Citadelle.

photo jcb



Des vers, dus à René II, en reconnaissance à la Vierge qui l’a aidé dans la bataille de Nancy  de 1477 sont gravés de part et d’autre de la porte; ils sont approximativement de 1505 selon Lionnois.


Signification des vers gravés à gauche de la porte :
« Homme, toi qui viens à Nancy, rends le salut, — comme
le devoir t'y appelle — à l'annonciation de l'ange, à celui qui a été le légat
de l'Incarnation de Jésus, né d'une Vierge pure, dis : Ave Maria, car Marie
est le seul espoir de Nancy. »



Signification des vers gravés à droite de la porte (photo ci-dessous):
Vierge, de qui Dieu fut en terre né,
Tu donnas nom triomphant à René,
Duc de Lorraine, armé sous ton enseigne ;
Mil. IIII. C. septante et six l'enseigne.

ou encore :
« Comme nous l'apprend l'an 1476, la bataille de Nancy fut livrée le 5 janvier 1477



La première lettre gothique « A », en fleuron (A, à gauche de la porte) est la seule à subsister en relief après les actions de détérioration au moment de la Révolution ( 1792); les autres lettres ne présentent plus leur relief.

En 1600, Elysée de Haraucourt succède à Jean de Salm, comme gouverneur de Nancy ; Il est conseiller d'état et surintendant des travaux, charges qu'il conserve jusqu'à sa mort en 1629 ; il développa les fortifications de la ville.
En 1615, Elisée d’Haraucourt modifia la façade extérieure de la vieille porte de la Craffe en mettant la Vierge dans une niche Renaissance et en ajoutant des colonnes torses très ornées. Armes pleines de Lorraine et celles d'Elisé de Haraucourt sont ajoutées sur la clé de la porte.

En 1616, un petit lanternon est crée entre les deux tours avec une horloge ; il contenait les cloches venant de l’église Saint-Epvre.

 

La façade côté ville va subir une modification profonde avec l’occupation des Français à partir de 1633; Louis XIII modifie la porte sur cette façade en apposant un ordre grec avec fronton triangulaire et piliers doriques. ( ci-dessous, la porte en 1840, à gauche ou en 1830, à droite)

Sur la photo de gauche,on oberve une étoile de David, enseigne d'une brasserie / café, à droite de la porte. L'étoile des brasseurs, étoile du brasseur ou la croix du brasseur est un symbole alchimique ancien dont l'usage est attesté dès 1397 dans la communauté des brasseurs et des malteurs.

Représentation symbolique de l'alchimie brassicole mettant en œuvre les quatre éléments (terre, feu, eau, air), elle servait au départ à éloigner les esprits malins ou les incendies afin de protéger la bière.

Bien vite elle devint une enseigne signalant une brasserie, notamment dans le monde rhénan et bavarois. On la trouve aussi sur les récipients contenant de la bière. Son usage déclina à partir du XVIIIe siècle.


 


cliché Berger-Levrault et lithographie Engelmann

La porte conserve son ordre néo-classique avec pilastres et fronton jusqu'en l'année 1861 (voir ci-dessus), date à laquelle le génie militaire qui en était alors propriétaire réalise d'importantes modifications; le commandant du génie Trancart la restaure à cette date dans le style néo-gothique, faisant disparaître également l'horloge qui la surmontait.

Le décor restauré comporte des copies d'effigies de ducs de Lorraine, une Vierge à l'Enfant du XIVème siècle et une ouverture en forme de croix de lorraine
La porte d'entrée se termine par un arc en tiers-point.

 On ajoute un blason aux alérions dans la trémie de la voûte, et sur la façade intérieure un chardon et une grande croix de Lorraine.
Afin d’éclairer l’intérieur, une ouverture circulaire a été faite au milieu de la voûte ainsi qu’une autre semi-circulaire près de la face extérieure. La dernière éclaire des moulures et alérions.
la date de la restauration est gravée en deux endroits. La date de 1336 sous le règne du Duc Raoul, fait-elle référence à l'existence à cette date de la porte dite des Bordes ? N'eût-il pas été préférable d'indiquer 1360, début du règne de Jean 1er après le régence de Marie de Châtillon?
Deux dates figurent sur des piliers : 1498 et 1515 ; correspondent – elles du point de vue signification à la bataille de Malzéville et à celle de Marignan ou combattit le duc Antoine ?

janvier 1429: Un cortège bien singulier

C'est par cette porte primitive que dut passer Jeanne d'Arc en janvier 1429, quand elle vint demander un sauf-conduit au vieux duc Charles II.

"Quelques hommes d'armes entouraient une jeune fille et semblaient plutôt ses vassaux que ses conseillers. En passant sous la porte Sacrée, la jeune fille arrête son noir destrier, cadeau du vieux duc de Lorraine Charles II, elle leva les yeux vers l'image de la Madone et, comme fortifiée par une inspiration céleste, elle fit lever la barrière et s'élança hors de Nancy, en s'écriant : « En, avant! En ayant ! Pour la France I »
C'était la fille du peuple, la sainte de la patrie, Jeanne de Domrémy, qui s'en allait joyeuse à sa glorieuse mission.après avoir franchi sa première étape et obtenu sauvegarde et appui de son légitime souverain" (E.Badel)



Les deux portes piétonnes sont établies en 1870 par l'architecte de Nancy Prosper Morey afin d’améliorer le passage.

La ville de Nancy est propriétaire de la porte depuis 1877 ; en 1898 elle sert de prison militaire (louée au 20ème corps d’armée).

Aujourd’hui salles fortes et cachots ne sont pas visitables (photo ci-dessous).

Début vingtième siècle, avant les aménagements /  modifications et création de la rue des Frères Henry

à droite le collège de la Craffe, anciennement Institut de Mathématiques et de Physique

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La porte de la Citadelle, un bel exemple d'architecture militaire


A la fin du 16ème siècle, Charles III voit la nécessité d’entourer la ville de fortifications (bastions, courtines,...) et l’ingénieur Orphée de Galéani entoure la porte de la Craffe de bastions. Une seconde porte (la porte de la citadelle actuelle), de style Renaissance avec fronton triangulaire, niches, pilastres rustiqués, encorbellements, est ainsi crée au même moment que les bastions Le Duc (en hommage à Charles III) et Le Marquis (en hommage au futur Henri II, marquis de Pont) ; la mention 1598 figure sur le marbre (côté extérieur). Elle portera le nom de Porte Notre-Dame du nom de la Vierge qui occupait une niche ornée de deux pilastres d’ordre ionique, tout en haut, jusqu’à la Révolution ; elle était entourée de drapeaux, d’étendards, de trophées militaires, de canons avec une grenade embrasée au-dessus de la niche. Cette Vierge a été remplacée en 1863 par la statue, œuvre de Jiorné Viard, représentant Charles III portant la charte de la Ville de Nancy ou de la fondation de l’Université de Pont-à-Mousson.



Bastion Le Marquis 1898.  Caserne Hugo, Porte de la Craffe, flèche du Palais ducal et Saint-Epvre


La citadelle : cession des terrains à la ville, différents plans et gravures de la porte. Fonds Wiener



La citadelle par Beaulieu 1650-1670









Sur le socle de la statue  de Charles III :"Charles III, duc de Lorraine el de Bar, fondateur de la Ville-Neuve de Nancy, fortifiée par lui suivant un système perfectionné qu'il appliqua à la Ville-Vieille, en construisant sa première enceinte bastionnée"
La statue du duc Charles III qui se trouve dans le fronton triangulaire, qu'entourent des drapeaux et des canons, n'a été installée là qu'en 1864 sur l'initiative de Guerrier de Dumast. Avant la Révolution, il y avait là une Vierge-Mère, qui a orné ensuite le perron d'honneur de l'ancienne Chartreuse de Bosserville. En 1862, le sculpteur Giorné Viard, avait ciselé cette statue en pierre de Charles III pour le palais de l'Académie créé par Prosper Morey (avec celles du Cardinal de Lorraine, de Stanislas et de Napoléon-III). Elle fut trouvée trop grande et transportée au fronton de cette porte de la Ville-Vieille.
D'aucuns pensent que la statue aurait pu être positionnée sur la porte Saint-Nicolas, Charles III ayant créé la Ville-Neuve.



 

Au-dessus de la porte centrale, les sculptures représentant les armes de Salm (gouverneur de Nancy) ont disparu de même que les armoiries pleines de Lorraine à l’étage supérieur. Par contre on trouve encore de beaux trophées d’armes ainsi que deux grandes statues (peut-être non originales) avec la devise  « Scutum inexpugnabile oequitas » (l'équité est un bouclier qu'on ne saurait vaincre). Cette devise est d'ailleurs aussi la légende d'un jeton de Charles III de 1598.
Les deux statues placées dans les niches sont jugées beaucoup trop grandes pour l'emplacement qu'elles occupent, et proviennent peut-être du beau perron du jardin ducal (selon Prosper Morey).



Ces statues ont été placées après la Révolution; on croit y voir l'Equité et la Victoire



 


la façade intérieure de cette porte (côté Citadelle)

la façade intérieure de cette porte (côté Citadelle) est intéressante ; on note:
- la présence de quatre guerriers au-dessus de l’attique dont deux à cheval avec lance ou épée et deux fantassins en position de combat ;
- des trophées d’armes ;
- des personnages allégoriques avec massues au niveau des montants de la porte aux bossages vermiculés .
Florent Drouin est l’auteur de cette ornementation.

(photos ci-dessous)




Ces ornements de la porte de la Citadelle ont été réalisés par le grand architecte et sculpteur nancéien Florent Drouin le Jeune, en 1596, auteur par ailleurs de la statue équestre du Saint-Georges de la porte du même nom (1608), de la Cène des Cordeliers (1582) et du Mausolée du Cardinal de Vaudémont. Toute l'ornementation de la porte a coûté 4000 francs de Lorraine.

Admirables bas-reliefs de guerriers à cheval ou à pied par Florent Drouin sur la façade intérieure de la porte de la Citadelle

On trouve :
- la présence de quatre guerriers au-dessus de l’attique dont deux à cheval avec lance ou épée et deux fantassins en position de combat ;
- des trophées d’armes ;
- des personnages allégoriques avec massues au niveau des montants de la porte aux bossages vermiculés .

Les Drouin sont une famille de sculpteurs lorrains, deux portant le prénom Florent.
Florent Drouin dit le Jeune, auteur de ces décors est un sculpteur et architecte lorrain du 16ème siècle, né vers 1540.
Après une période de formation à Rome il revient en France où il est nommé maître des œuvres de l'évêché de Metz. Il est appelé à Nancy vers 1571 par Charles III. Florent Drouin le Jeune commence à travailler au palais ducal en 1572 ; la même année, il fait une statue d'Adonis. En 1576, d'après les comptes du Trésorier, il exécute une cheminée dans la grande salle du palais. En 1581, il obtint la charge de maître des œuvres du duché de Lorraine. L'année suivante, il reçoit la commande d'une Cène pour l'église des Cordeliers de Nancy. En 1589, il sculpte, dans la même église, le mausolée du cardinal de Vaudemont, mort en 1587. Auparavant, en 1583, il aurait dirigé les travaux du château de Vézelise. En 1594, il était au nombre des artistes occupés aux apprêts des fêtes du mariage de la princesse Elisabeth, fille de Charles III, avec Maximilien de Bavière. En 1596, il orne de sculptures la porte Notre-Dame (photos). En 1607, il dessine le plan d'une fontaine destinée à la grande place de l'hôtel de ville. En 1608, aidé de Simon Drouin et de Jean Richier, il surveille toute l'ordonnance de la pompe funèbre du duc de Lorraine, Charles III. La même année, il s'engage à placer une statue de Saint- Georges sur la porte de ce nom. En 1609, il fournit encore les modèles des motifs d'ornementation, élevés lors de l'entrée solennelle dans la ville du nouveau duc Henri II. Il meurt en 1612.
Comme il faisait partie d'une famille d'artistes qui tous demeuraient dans Nancy, il est assez difficile de déterminer la part de chacun dans les nombreux travaux attribués aux Drouin. Un, entre autres, Florent Drouin, dit « le Viel », maître d'œuvre et ingénieur du duc de Lorraine, portant le même prénom que notre artiste et vivant en même temps que lui, il devient à peu près impossible, quant aux œuvres d'architecture, de donner une désignation bien certaine. Une rue Drouin à Nancy rend hommage aux sculpteurs/ artistes de cette famille. Pour en savoir plus : « une famille de sculpteurs lorrains » par Henri Lepage

 


Admirables bas-reliefs de guerriers à cheval ou à pied par Florent Drouin

 

 

Texte original de la commande faite pour la construction de la porte de la façade intérieure de la Porte Notre-Dame-des-Champs (porte de la Citadelle):

« De la Porterie Notre-Dame, qui est du côté de la ville, ayant environ 21 pieds de large, y compris les largeurs des pilastres qui seront de chaque côté d'icelle, et 39 pieds de haut, depuis le pavé jusqu'au dessus du frontispice, laquelle sera faite de la plus belle et meilleure pierre de taille que l'on pourra trouver aux perrières de Pont-à-Mousson (carrières de Norroy), Pont-St-Vincent et Viterne; les pilastres qui sont de côté et d'autre selon l'ordre dorique, comme aussi le reste de ladite Porterie, et rustiquée de la plus belle façon que faire se pourra, aux endroits où il est représenté sur le modèle, auquel seront représentées les armoiries de Son Altesse, de la largeur de huit pieds, et semblable hauteur, comme aussi celle de Monseigneur le comte de Salm, taillées et posées à la clé de ladite Porterie, au-dessus de celles de Son Altesse, de 4 pieds de hauteur et de pareille largeur; des trophées bellicques et autres ornements représentés par le modèle, y mettre et appliquer quatre pièces de marbre noir de Dinan, et six pièces d'autre marbre jaspé tiré des montagnes proches de Nancy (les carrières de la côte Sainte-Catherine), bien polis, aux lieux représentés par ledit modèle. Enfin, rendre le tout de ladite Porterie bien taillée et joint avec bonnes liaisons tant dedans que dehors, et les proportions  de toutes choses y requises bien observées, selon que Maître  Nicolas, ingénieur de Son Altesse les ordonnera; fournir toute la pierre de taille à ce nécessaire, à leurs frais et dépens, ayant chacune d'icelles pour faire la liaison deux pieds de queue, l'une portant l'autre, sans y comprendre les saillies des moulures et ouvrages y représentés; rendre ainsi ladite Porterie, faite et: parfaite, et pourquoy faire leur sera fourni aux dépens de Son Altesse: chaux, sable, roches, bois, cordages à faire les échafauds et cintres, comme aussi une loge en planches et hallier pour la pourvoir tailler à couvert... Il leur, sera donné la somme de quatre mille francs de Lorraine»

Hélas, au moment de l'occupation par le Génie Militaire, marbres et riches décorations, dont les armoiries ducales, ont été mutilés pour ouvrir des fenêtres sans style pour le logement du commandant de la Citadelle.


Sur la Citadelle:


Louis XIII décide de construire une citadelle avec des casernes et des magasins entre la porte de la Craffe et la porte Notre-Dame (ou porte de la Citadelle) ; ces constructions sont complétées par l’édification de deux bastions dirigés contre la Ville afin de se protéger de la population ; les boulevards réalisés en 1505 sont transformés en réduits séparés de la ville par un mur. Ce sont le bastion de la Reine en l’honneur d’Anne d’Autriche et le bastion de Saint-Louis.
Un fossé alimenté par le ruisseau de Boudonville sépare la ville de la porte et court le long de la rue de la Craffe actuelle et derrière la rue Brissonnot actuelle. Les fossés séparent bastions, demi-lunes, ville. Un pont-levis permettait d'atteindre la demi-lune du bastion ; une autre passerelle franchissant un deuxième fossé permettait d'atteindre la campagne

Les portes de la Craffe et de la Citadelle intégrées aux défenses de la ville à différentes époques.

En 1611 (plan de La Ruelle à gauche), la porte de la Craffe est parfaitement intégrée aux remparts et protégée par un mur à l'extérieur; ce plan donne une parfaite idée des bastions Le Duc et le Marquis, des retranchements, des demi-lunes et de la manière de passer de la ville à l'extérieur.

Plan de 1758 à droite; la citadelle avec casernes, logement des militaires, chapelle,..., les bastions et les réduits. Depuis la ville on accède directement à la porte de la Craffe par un pont droit. Ce n'était pas le cas sous Louis XIV et l'occupation jusqu'au traité de Ryswick où l'accès se faisait sur le côté de la porte, l'entrée de la porte jusque là utilisée étant cachée par un mur d'escarpe.

 

Plan de Mique (1785) à gauche (Nancy à l'époque de Louis XVI) avec Porte Notre-Dame intérieure(5), Porte Notre-Dame extérieure (4) prisons militaire dans la porte de la Craffe (6), logement du Commandant dans la porte de la Citadelle (8). Les deux portes ont le même nom. Il n'y a pas de pont devant la porte Notre-Dame (Craffe); on accède par un terre-plein et on remarque déjà la place en forme d'hémicycle devant la porte. Nous sommes dans le Nancy de Louis XIV.

Les portes en 1822 (à droite); La Porte Notre-Dame (Craffe) et la porte de la Citadelle toujours présentes devant Nancy avec les bastions.

 



En hautPorte de la citadelle à Nancy
Auteurs :
Devilliers, Etienne (1784-18..). Lithographe
Rauch, Johann Joseph (1803-18..). Dessinateur
Guibal (18..-18.. ) Dessinateur
Date :
1830/1840
Bibliothèques de Nancy

Au centre, la  Porte Notre-Dame (Craffe) vue depuis le calvaire, de Christophe,Louis (1816-1874) lithographe (bibliothèque de Nancy)

" Le réduit Saint-Louis a été nivelé vers 1880, après avoir porté successivement sur son lerre-plein une glacière, un gymnase de pompiers, les ateliers nationaux en 1848, un calvaire; aujourd'hui, l'école de brasserie et une partie de l'institut chimique occupent sa place. Le bastion Le Duc, de son côté, est tombé, el là où étaient ses faces s'alignent aujourd'hui la rue Grandvillc et la rue du Bastion" ( Pfister tome 2)

En bas, plan de 1830 avec citadelle et emplacement  du calvaire de la lithographie précédente

 En 1870, on pensa encore garder ces bastions et l'on revint en partie aux projets de Dosse. On créa la promenade dite des Bastions : un escalier menait de la rue de la Craffe sur le réduit de la Reine ; on gagnait de là le bastion Le Marquis, qu'on descendait en arrière de la porte extérieure de la Craffe, pour remonter sur le bastion Le Duc, atteindre le réduit Saint-Louis et arriver au manège des Pages à la Pépinière . Mais cette promenade resta inachevée et la ville se décida à sacrifier ces bastions qui, avec le développement du faubourg des Trois-Maisons, se trouvaient comme placés au cœur de Nancy et formaient un véritable contresens.


Reste des fortifications actuellement près de la porte de la Craffe; un examen attentif semble montrer une zone dépourvue de briques, peut-être vestige de l'entrée qui se faisait sur le côté sous le règne de Louis XIV?
Phototype Bergeret (1900): la porte en 1830 et le même mur

Le jardin de la Citadelle.
Carrés de plantes médicinales et aromatiques et très beaux arbres sur les remparts avec la porte de la Citadelle au fond.

 Les anciennes fortifications de Nancy

Superposition des plans de Nancy et des anciennes fortifications- 1909 (C.Pfister-BNF)

Les premiers remparts sont de simples murs de pierre sans flanquement (courtines) qui vont intégrer les Bourgets sous le duc Jean 1er  au 14ème siècle, après démolition de la porte Bézuel puis bien plus tard la Carrière sous la minorité de Charles III avec Christine du Danemark. On y trouve vers 1475 des fossés et une vingtaine de  tours de quelque 25 mètres de diamètre avec en particulier les deux tours de la Craffe depuis 1463. Sous le règne d’Antoine, des barbacanes sont construites devant la porte Saint-Nicolas et la poterne Saint-Jean, un « bollwerk » ou terre-plein devant la porte de la Craffe.

Vers 1530- 1540 des travaux sont réalisés sur les remparts et les tours ; des pierres de taille remplacent la blocaille. Digue et système de distribution des eaux du ruisseau de Boudonville apparaissent aussi.
L’artillerie, la puissance des armes et les techniques de siège évoluant, des améliorations apparaissent nécessaires ; dès 1544, sous le règne du duc Antoine, on retrouve à Nancy les ingénieurs et « fortificateurs » italiens, très innovateurs en matière de fortifications.

En 1552- 1553 alors que nous sommes sous la régence  d’Antoine de Vaudémont et Christine de Danemark on trouve trace d’Antoine de Bergame  qui travaille sur les fortifications de Nancy et transforme en bastions, ouvrages apparus en Italie,  l’enceinte  de Nancy afin de se garantir d’Henri II roi de France. C’est à cette date qu’Henri II expulse les régents et envoie Charles III en France ; il permet cependant la continuation de la mise en place de fortifications.

Pendant la période 1552- 1558  trois bastions sont réalisés: le bastion de Vaudémont, du nom du régent, le bastion de Danemark, du nom de la duchesse mère au niveau de l’extrémité du cours Léopold, le bastion des Dames, derrière « la Cour », bastion qui se caractérise par son angle obtus ; ce sera  plus tard le « parterre d’en haut » ou le jardin du Gouvernement actuel.

Puis apparait vers 1560-1563, le bastion d’Haussonville, du nom de Balthasard d’Haussonville, gouverneur de Nancy de 1560 à  1563, au niveau de ce qui sera plus tard la terrasse du Café La Rotonde puis le Musée des Beaux-Arts.
Ainsi quatre bastions sont réalisés à l’arrivée de Charles III à Nancy en 1562.

Plan de La Ruelle (1611) : bastions et fortifications vers la porte de la Craffe et porte de la Citadelle; bastions Le Duc et le Marquis, retranchements

Plan de La Ruelle (1611): bastions d'Haussonville et de Vaudémont et porte Saint-Nicolas

 

Compte-tenu des guerres de religion, il y a nécessité à se protéger et vers 1570-1573, les courtines sont refaites avec des remblais de terre et des contreforts, les anciennes tours sont rasées et de nouveaux bastions apparaissent : ce seront le  bastion Notre-Dame qui deviendra le bastion des Michottes puis le bastion de Salm, du nom du gouverneur de Nancy en 1563 après d’Haussonville, car la distance entre les bastions du Danemark et celui des Michottes est jugé trop grande pour une protection efficace.
Le plan de La Ruelle montre parfaitement le nom de Salm figurant sur le bastion du même nom, les saumons de Salm, les armoiries de Salm et celles de la Lorraine ; on visualise parfaitement la configuration des constructions.

Plan de La Ruelle (1611): bastion de Salm; détail de la construction- marque 1602 sur la courtine à gauche- indication "SALM" et saumons de Salm sur le bastion.

 

A la même période, on construit les deux retranchements soutenus par des murs extérieurs sur la porte de la Craffe (voir le plan de La Ruelle) ; ils disparaitront en 1905-1907. Plus tard, s’appuieront sur ces deux retranchements les deux bastions Le Marquis, en l’honneur d’Henri II fils de Charles III et marquis de Pont, et Le Duc en l’honneur de Charles III. Ces deux bastions seront reliés par une muraille avec une porte : la porte de la Citadelle dont la date de fin des travaux est 1598.

Les Italiens « fortificateurs- ingénieurs »  sont Antoine de Bergame et Jérôme Citoni ; on citera aussi Jean Errard de Bar- le- Duc qui, appelé par Charles III en 1580, travaille sous les ordres des Italiens et révolutionne l’art de fortifier ; protestant, il entre plus tard au service d’Henri IV, écrit des ouvrages innovants sur les fortifications.  Il a été à Henri IV ce que sera Vauban pour Louis XIV et peut être considéré ainsi un précurseur de Vauban.

L’œuvre de Jean Errard (1554-1610), ingénieur meusien en grande partie oublié, précède celle de Vauban. Il est, en quelque sorte, le père de la fortification française. Selon lui, la défense d’une ville repose plus sur l’infanterie que sur l’artillerie dont le feu n’a pas grande efficacité de face. La géométrie qui conditionne son travail d’ingénieur- concepteur de fortifications est décrite dans son ouvrage « La fortification demonstree et reduicte en art » accessible ici
Citadelles et bastions sont apparues d’abord en Italie en 1525 puis en France en 1530. On voit dans son ouvrage comment il introduit en France les grands principes des fortifications bastionnées. Ce travail sera repris ultérieurement par d’autres ingénieurs dont Vauban .
Il sera anobli par Henri IV et deviendra ingénieur ordinaire des fortifications des provinces d’Ile de France et Picardie.


Errard de Bar-le-Duc Photo Mi.Petit: Musée Barrois / Bar-le-Duc


Jean Errard (né vers 1554 à Bar-le-Duc et mort le 20 juillet 1610 à Sedan) était un mathématicien et ingénieur militaire lorrain; Après ses études à l'université d'Heidelberg, il entre au service du duc de Lorraine Charles III et se forme dans l'art de la fortification à l'école des ingénieurs de Nancy puis en Italie. Initialement au service de la cour Ducale de Lorraine, converti au protestantisme, il s'engage au service du roi de France Henri IV. Introducteur en France de la fortification italienne, il est ainsi un précurseur de Vauban. Jean Errard est considéré comme le premier ingénieur à appliquer en France la fortification bastionnée.

Les ouvrages de Jean Errard :
•    Le premier livre des instruments mathématiques méchaniques - Nancy, Jean Janson, 1584
•    La géométrie et pratique générales d'icelle - 1594 (Rééditions en 1602, 1619, 1621)
•    Les six premiers livres des élémens d'Euclide traduits et commentés - 1598 (Réédition 1629)
•    La fortification réduite en l'art et démontrée - 1600 (Rééditions en 1604, 1620, 1622)

Le premier livre des instruments mathématiques méchaniques - Nancy, Jean Janson, 1584. Après ses études à l'université d'Heidelberg, il entre au service du duc de Lorraine Charles III et se forme dans l'art de la fortification à l'école des ingénieurs de Nancy puis en Italie. Editeur nancéien du livre: Jean Janson. Consultable à Nancy et  ici en numérisé


Son oeuvre majeure, • La fortification démonstrée et réduicte en art (Paris, 1600) Texte Gallica [archive].....avec plusieurs éditions. Décrit le principe de la fortification bastionnée. Consultable ICI

Dédiée à Henri IV, elle est très rare et manque à beaucoup de grandes bibliothèques publiques. Le XVIe siècle est marqué par une véritable évolution en matière de fortification. Apparaissent notamment pour la première fois, en Italie (1525), puis en France (1530), les bastions et les citadelles. L'œuvre d'Errard s'inscrit dans ce courant, elle annonce celle de Vauban. Son ouvrage repose sur les données de la géométrie, l'auteur nous explique tous les procédés qui permettent de tracer sur le terrain les différents polygones, réguliers ou irréguliers, indispensables pour bien fortifier une place. Véritable somme sur le sujet, cité par ses successeurs, le livre a servi de référence à tous les auteurs de traités ultérieurs, et connut des rééditions, des contrefaçons et des traductions. Une partie des frais d'impression de l'édition originale fut prise en charge par Henri IV, à la demande de Sully, qui était alors surintendant des fortifications de France.

Les autres italiens ingénieurs de fortifications dont il faut citer le nom sont :
- Orphée de Galéan  qui d’abord achève les fortifications de la Ville-Vieille, construisit les bastions Le Duc et le Marquis et les combine aux autres ;
- Jean- Baptiste Stabili qui crée de toutes pièces les fortifications de la Ville- Neuve.
Ces bastions utilisent les dernières inventions, par exemple des renfoncements, le système à orillons attribués à Jean Errard mais en fait connu auparavant ; ces orillons permettent de mieux surveiller la courtine et les fossés tout en restant à l’abri. Le boulevard de 1505 devant la Craffe disparait avec ces travaux.
Une demi-lune existe sur le plan de 1611 ; est-elle de Galéani ? On remarque une échauguette sur le terre-plein. Il y avait trois ponts pour parvenir à la ville depuis l’extérieur.

Stabili modifie tous les anciens bastions qui deviennent alors à orillons sauf ceux des Michottes et Salm car plus récents.
En 1602, après son départ, on refait en pierre de taille la courtine entre les bastions du Danemark et celui de Salm ; cette courtine porte la date de 1602  sur le plan de 1611 de La Ruelle.

Ainsi tout est presque terminé au début 17ème siècle. Les réalisations sont imposantes, en pierre de taille à la base des courtines et bastions, aux briques vertes, blanches, rouges avec dessins, une double rangée de pierres de taille en haut de la muraille, faisant saillie ; la muraille est inclinée côté ville. On voit parfois des pierres de taille au milieu des briques. Ces réalisations sont très élevées et seuls dépassent les tours de la Craffe, la flèche du Palais Ducal, la tour des Cordeliers, le clocher de Saint Epvre ; les fossés de huit mètres  sont remplis avec l’eau venant de l’étang Saint-Jean ou du ruisseau de Boudonville.
On remarque sur les bastions la présence d’échauguettes aux trois angles, construites en pierre de taille et avec un toit en poivrière ; des galeries secrètes permettent de sortir vers la campagne ou d’accéder à l’arsenal depuis le bastion de Salm.
Henri IV, en visite en 1603, reconnait ces fortifications comme les plus belles fortifications d’Europe …mais dit-il  « il faudrait un roi de France pour les garder ! »

1673-1698: Nancy à l'époque de Louis XIV, avant le Nancy de Léopold

- plan de Jean Cayon, illustrant Nancy en 1673,copie d'un plan dont on ignore l'auteur.

- plan de De Fer 1693 ci-dessus
:
Nancy fortifiée; chemins hors de la ville; bastions et fortifications, demi-lunes; plus de porte Saint-Nicolas ( démolie en 1673) mais la porte Royale face à la Carrière. Plus de tour au bastion des Michottes, non rétablie lors des fortifications de Louis XIV.


Noms des bastions de la Ville-Neuve:
1-        Saint- Jacques
2-        Saint-Georges
3-        La Magdelaine (La Madeleine)
4-        Haraucourt
5-        Saint-Nicolas
6-        Solrup (Saurupt)
7-        Saint-Thiébaut
8-        Saint-Jean

Noms des bastions de la Ville-Vieille:
9-  de Vaudémont
10-      d’ Haussonville
11-      Michottes
12-      Salm
13-      Danemarck
14-      Marquis
15-      Duc
16-      Cour
17-      Le Réduit

« Ce plan  représente les demi-lunes et les glacis, et s'étend  jusqu'à la côte de Malzéville, celle de Sainte Catherine; on voit Nabécort, « Solrupt », dont il trace les limites, la forme de ce fort et ses fossés, Bonsecours, Tomblaine, etc., le tout fort exactement. Il y a peu de différence pour l'emplacement des rues et des maisons entre ce plan et celui de La Ruelle mais ce dernier montre néanmoins ce qui est bâti ou ce qui n'est qu'en jardins, ce que ne fait pas  celui du Sieur de Fer, qui par ses lignes n'indique que les rues renfermant les îles des maisons. Il a marqué la Citadelle construite par ordre du Roi de France » (Lionnois)

 

Jean-Baptiste Stabili et Nicolas Marchal.

Stabili arrive fin 1598 comme intendant général des fortifications après le départ de Galéani ; il est l’auteur du plan de la Ville- Neuve, celui de Galéani n’étant pas exécuté.  Il meurt en 1611 avant la fin des travaux.
Nicolas Marchal un entrepreneur est alors désigné pour accélérer les travaux ; il a déjà travaillé sur les fortifications de la  Ville- Vieille et a par ailleurs construit la boucherie en Ville-Vieille. Il est nommé ingénieur en 1597 puis entrepreneur en 1603 avec pour mission l’obligation de terminer la construction des remparts de la Ville- Neuve suivant les plans de Stabili. Il ne pourra respecter le contrat avant sa mort, à savoir terminer les travaux en sept ans mais cet échec vient aussi du fait que des modifications ont été demandées par Charles III.
Par exemple, de nouveaux espaces décalant la ville vers l'est, la destruction de la porte des Moulins (située grossièrement à l'intersection des rues Barrès et Saint-Georges actuelles) qui sera rapidement remplacée par la porte Saint-Georges pour permettre la construction de la Primatiale ou encore la création de nouveaux bastions ont modifié le projet initial donc retardé la réalisation du contrat. A la mort de Charles III en 1608, Stabili écrit à Henri II, son successeur, pour que la responsabilité de ces retards incombent à Marchal ….qui meurt en 1611.

 

Jean L’Hôte, Nancéien, prend la suite de Stabili ; il est, en 1613, ingénieur des fortifications pour Henri II et termine les travaux ; il en entreprend de nouveaux comme la création d’une demi- lune devant la bastion Danemark identique à ce qu’on trouve devant la porte de la Craffe réalisé par Galéani puis il crée d’ autres demi-lunes devant d’autres bastions de la Ville-Neuve avec fossés devant les demi-lunes, qui apparaissent comme des îles. Enfin, il construit  des cavaliers sur les bastions pour surveiller l’ennemi  dont un plus grand sur le bastion des Michottes (appelé alors bastion du Grand Cavalier). On ne voit pas ces demi-lunes sur le plan de 1611 antérieur à ces réalisations. Il faut observer les plans ultérieurs.
Autres ouvrages réalisés par Jean L’Hôte : des contrescarpes devant les bastions, des murailles de protection, chemins de rondes, glacis, poudrières et magasins … toutes ces modifications  ne seront terminées qu’en 1630.

Selon Vauban, l’ouvrage des fortifications de Nancy est un chef-d’œuvre.

à gauche: au Musée des Beaux-Arts de Nancy

D'importants vestiges classés aux Monuments Historiques ont été  mis à jour lors de l’agrandissement du musée des Beaux-Arts de Nancy dans la période 1991-1997 ; ils sont datés entre 1480 et 1673 :

  • un ouvrage de protection de la vieille porte Saint-Nicolas de 1480 (barbacane), ouvrage bâti par René II suite aux premières attaques de Charles le Téméraire en 1475 ;
  • un fossé et une porte en bois de l’entrée de la barbacane, porte à laquelle on accédait après franchissement d’un pont ;
  • un boulevard d’artillerie daté de 1510 ;
  • des vestiges du bastion d’Haussonville à orillon,  avec fenêtre de tir et casemate, datée de1560 et 1673 au moment de la reconstruction des bastions par Vauban ;
  • un mur de courtine daté de 1525 et reconstruit par Vauban en 1673 ;
  • une route et des objets ou marques de tailleurs de pierre.

à droite: l'impasse Sellier / la rue Sellier au niveau desquelles on trouvait le bastion Le Duc et sa demi-lune

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En 1632 Charles IV brouillé avec le France essaie de consolider les fortifications ; l’ingénieur est le mathématicien lorrain Bertrand Prinsé.
En 1633, guerre de Trente ans et fin du développement de Nancy ; la France réclame Nancy à Charles IV ; après un simulacre de résistance ce dernier  rend la Ville-Neuve au roi de France Louis XIII qui rentre dans Nancy. Les Français se serviront des fortins sur les bastions et sur la Craffe contre Charles IV et les Nancéiens ; les Français créent la Citadelle en 1634 et occupent la Ville-Vieille.

Plan et travaux de la Citadelle sont de Pierre de Conti d’Argencourt ; celui-ci comble le fossé entre les deux portes la Craffe et de la Citadelle et en crée un nouveau entre la Citadelle et la Ville-Vieille le long de la rue de la Craffe et derrière les maisons  de la rue Braconnot. Un pont-levis relie la Ville-Vieille et la Citadelle.(voir photo ci-dessous)
Les bastions Le marquis et Le Duc sont modifiés (ouvrages à corne)  et surtout dirigés contre la Ville et séparés de la Ville-Vieille par une muraille. Les deux retranchements derrière ces deux bastions sont le bastion Saint-Louis en référence à Louis XIII et proche du bastion Le Duc et le bastion de la Reine (appelé Richelieu précédemment) proche du bastion Le Marquis. Des meurtrières sont faites dans la porte de la Craffe, contre la ville et diverses constructions sont réalisées dans la Citadelle, magasins ou logements de militaires. La Craffe étant fermée et isolant la ville de la Citadelle, une nouvelle porte est crée en 1637 (démolie en 1661), parfaitement visible sur le plan de Beaulieu: la porte Saint-Louis, dans la courtine reliant le bastion Le Duc à celui des Dames ; il s’agit d’une porte simple. Des ponts permettent de franchir fossés et demi-lunes.

Porte Saint-Louis, dessin d'Emile Gallé

Gravure d'Israël Silvestre sur la porte Saint-Louis

Plan du côté de la Citadelle

Plan avant et après la construction de la citadelle en 1634 (plans de Mérian 1 et 2)

La citadelle voulue par Louis XIII sur le réduit séparant les deux portes sera constituée de casernes, de divers magasins, d'une poudrière,...Par ailleurs la défense face aux habitants de la ville est assurée par la création des bastions de la Reine et de Saint-Louis ainsi  par la création d'un fossé au pied de la porte de la Craffe.

"La Citadelle de Nancy du toit de St Epvre". Dessin de Beaulieu (1645).
 On voit, à droite, l’éphémère porte St Louis symbole de l'occupation française entre 1637 et 1661
 (Bibliothèque municipale de Nancy - H-FG-DE-16) - NancyRétro Clément Daynac


Plan de Mathieu Mérian (après 1633 car la citadelle est construite) Agrandissement ICI; fossé devant la porte de la Craffe pour isoler la Citadelle faite en 1634 . La Citadelle est isolée par l'eau. Par contre plus de fossés entre les deux portes de la Craffe et de la Citadelle (portes Notre-Dame).
Encore la porte Saint-Nicolas. Une tour au bastion des Michottes.


 Vue d'optique de la ville de Nancy fortifiée

La ville de Nancy est restituée en 1661 à son maître légitime le duc de Lorraine  par le traité de Vincennes signé entre Louis XIV et Charles IV, moyennant la destruction des fortifications qui démarre en mai 1661. En août, les fortifications de la Ville-Neuve de Stabili et Jean L’Hôte n’existent plus sauf les portes. A cette date, démarrent les démolitions des fortifications de la Ville-Vieille.

Le traité de Montmartre de février 1662  entre Charles IV et Louis XIV ratifie la vente du duché de Lorraine à la France; Louis XIV est alors moins pressé de terminer les destructions des fortifs de la Ville-Vieille mais les Lorrains sont indignés et Charles IV honteux s’enfuit ; les démolitions repartent notamment pour les bastions Le  Marquis et Le Duc.
La France occupe de nouveau Nancy de 1670 à 1698 et toute la Lorraine de 1670 à 1672.

Louis XIV déclare la guerre à la Hollande en 1672 et décide avec Vauban de reconstruire les fortifications de Nancy suivant pratiquement le même schéma que le précédent  ce qui en dit long sur la qualité de ce qui avait été réalisé antérieurement. Ces travaux sont réalisés par M. de Saint-Lô, sous l’autorité de Vauban.

En 1673, Guillaume d’Orange soulève l’Espagne et l’Empire contre Louis XIV qui  hâte les travaux. Mais faute de temps on s’en tient uniquement aux travaux de la Ville-Vieille et on ne reconstruit pas les fortifications de la Ville-Neuve.
On refait le bastion d’Haussonville, des demi-lunes entre le bastion des Michottes et celui d’Hausonville, et entre celui d’Haussonville et le bastion de Vaudémont ; on ferme la vieille porte Saint-Nicolas de la Ville-Vieille et on construit la porte Royale. Des ponts permettent de franchir les fossés et de relier Ville-Vieille et Ville- Neuve.  La porte Royale permettra la liaison entre les deux villes de 1673 à 1751.
Fin 1673 les travaux étant terminés pour la Ville Vieille, on redémarre ceux de la Ville-Neuve qui sont achevés en 1679.

On retrouvait ainsi les fortifications de Charles III avec cependant  quelques modifications dans la forme, la hauteur et les matériaux utilisés, plus économiques.
Le traité de Ryswick de 1697 met fin à la guerre de la ligue d’Augsbourg entre Louis XIV et la Grande Alliance et restitue Nancy à l’ancienne famille ducale et au duc Léopold avec cependant comme condition la destruction des fortifications de la Ville-Neuve ; on peut garder l’existant de la Ville-Vieille à savoir  les huit bastions, les courtines, les fossés, la contrescarpe. Un mur d’octroi est accordé pour la Ville-Neuve. La Lorraine évacuée doit rester neutre.

Les destructions débutent en 1698 et sont terminées la même année : plus de demi-lunes ni de bastions en Ville-Neuve, sauf celui de Saint-Thiébault qui retenait les eaux de l’étang Saint-Jean. Dès le départ des troupes françaises, le duc Léopold arrive de Lunéville où il résidait depuis un moment.

Les Français réoccupent Nancy pour la troisième fois fin 1702 car l’Europe est en Guerre avec la succession de la couronne d’Espagne. Léopold repart pour Lunéville.

En 1714 les Français évacuent de nouveau Nancy et on construit un  mur d’octroi de grande hauteur autour de la Ville-Neuve, mur prévu par le traité de Ryswick ; on entre dans Nancy et on en sort par les trois portes toujours respectées depuis les occupations par les Français, à savoir la porte Saint-Nicolas, la porte Saint-Georges et la porte Saint- Jean.
Peu à peu, Nancy manque de place et le mur d’octroi est détruit. 

Sous le Nancy de Léopold
Ce plan de 1728 réalisé pour "l'Histoire de la Lorraine" de Dom Calmet montre la trace des anciennes fortifications de la Ville-Neuve d'avant le traité de Ryswick, le mur autour de la Ville-Neuve et les constructions réalisées par le Duc Léopold. Pas de place Royale ni de place d'Alliance évidemment. Premier plan avec la cathédrale orientée comme actuellement.

Qu’en est-il des fortifications de la Ville-Vieille ?
Le duc Léopold les entretient avec peu de moyens hélas et Stanislas ne fait rien car le duché devenu une véritable province de France depuis son arrivée, remparts et bastions sont jugés inutiles. Avec le création de la ville de Stanislas des modifications sont réalisées et à partir de 1766, date à laquelle le duché de Lorraine est intégré à la France, on démolit petit à petit remparts et bastions. Finalement il restera les deux bastions et les deux retranchements près le la porte de la Craffe.
On parlera en 1870 d’une promenade des bastions partant de l’escalier rue de la Craffe, passant par le réduit de la Reine, le bastion Le Duc, le réduit Saint-Louis et se terminant au manège des Pages ( en face de l’entrée de la Pépinière, rue Braconnot). Le développement  du quartier des Trois-Maisons empêchera l’utilisation de cette promenade  par les Nancéiens.

Le réduit Saint-Louis disparait en 1880 ainsi que le bastion Le Duc puis plus tard le réduit de la Reine.

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Les plans de la ville aux différentes époques montrent parfaitement l’évolution des zones urbaines et des jardins ; le plan de Mique de 1785 donne une idée précise des terrains, champs et jardins diversement cultivés ou non autour de la ville après disparition des fortifications.
Depuis le traité de Ryswick de 1697 en effet, la suppression des fortifications de la Ville-Neuve a d’abord permis la création d’une longue bande de terrains âprement convoitée faisant suite aux jardins et terrains observés sur le plan de 1611 et remplaçant les fossés, les demi-lunes et les bastions.
Le 19ème siècle, surtout après 1870, apportera les autres grandes évolutions que l’on sait : chemin de fer, canal, industries, habitat, la proportion de surfaces urbaines s’accroit et l’environnement de jardins et terrains maintenu par les fortifications pendant une longue période et même développé après la Révolution, disparait peu à peu.
Cette urbanisation ne permet plus aujourd’hui d’imaginer ce qu’était Nancy et ses magnifiques fortifications.

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Les fondations du bastion Saint-Jean lors de travaux place Thiers (place Simone Veil) en 1975 (document Daniel Pesce)


Photo permettant de visualiser quelques fondations des bastions et autres demi-lunes,

du côté du bastion de Saurupt, près du pont des Fusillés,

lors de fouilles avant construction de nouveaux immeubles (2015-2016)


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Pour s'y repérer: les ducs de Lorraine depuis René II dans la période de l'histoire des fortifications


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1473-1508 René II
1498-1515 Louis XII roi de France
1508-1544 Antoine
1545-1552 Christine de Danemark (nièce de Charles Quint) veuve de François 1er;
en 1552, elle est écartée par le roi de France en raison de sa politique favorable à Charles Quint 1552
1515-1547 François 1er roi de France
1547-1559 Henri II roi de France
1552-1559 : Régence de Nicolas de Mercoeur, fils d’Antoine, frère de François 1er, comte de Vaudémont Charles III 1545-1608
1559-1560 François II roi de France
1560-1574 Charles IX roi de France
1574-1589 Henri III roi de France
1589-1610 Henri IV roi de France
1608-1624 Henri II
1624-1625 Nicole fille de Henri II
1625 François II fils de Charles III
1625-1634 Charles IV fils de François II
1610-1643 Louis XIII roi de France
1634 Nicolas François
1634-1641 la Lorraine est occupée par la France
1641 Charles IV de nouveau
1641-1659 la Lorraine est occupée par la France
1643-1715 Louis XIV roi de France
1659-1670  Charles IV de nouveau
1670-1697 la Lorraine est occupée par la France
1690-1729 Léopold 1er
1729-1737 François III, empereur du Saint-Empire, fils de Léopold
1737-1766 Stanislas Leszcynski
1715-1774 Louis XV roi de France
1774-1792 Louis XVI roi de France

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bibliographie (BNF)

- Histoire de Nancy, C.Pfister, 1902-1909
- Des villes Vieille et Neuve de Nancy depuis leur fondation, Lionnois, 1805
- A. Lepage, bulletin de la Société archéologique de Nancy, Le Palais Ducal de Nancy,1852
- Henri Lepage; une famille de sculpteurs lorrains, les Drouin; 1863
- P. Digot, les ducs de Lorraine et Nancy, 1881
- P.Morey, le château du Duc Raoul, 1865
- L'immeuble et la Construction dans l'Est 1894, 1910, 1923
- C.Courbe, les rues de Nancy du 16ème siècle à nos jours 1885-1886

Photos A. Pfund

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