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Charles Mellin
Roger Marage
Charles Mitté

Charles Mellin (Nancy vers 1598- Rome 1649)



Charles Mellin « très excellent peintre »
 par Jacques Thuillier, publication de l'Ecole française de Rome 1981

Charles Mellin. Un Lorrain entre Rome et Naples
(Tribune de l'Art 2013)
 Compte-rendu des d'expositions de Nancy et Caen faites en 2007

Sa biographie (dossiers pédagogiques du Service éducatif de Caen)

Terre d’artistes, la Lorraine a formé plusieurs peintres ou graveurs de talent, de Jacques de Bellange (fin du XVIe siècle-1616) à François de Nomé (vers 1593-vers 1644), sans oublier Claude Deruet (1588-1660) ou Israël Silvestre (1621-1691). Certains d’entre eux se sont toutefois davantage illustrés en Italie. C’est le cas de Charles Mellin. Flamand d’origine – son père, ouvrier, s’installe à Nancy avec sa famille vers 1598 –, le peintre vit à Rome dès l’âge de vingt ans et mène une carrière italienne entre Rome et Naples. Il s’éteint dans la Ville éternelle le 21 septembre 1649. Son corps est inhumé dans la paroisse Saint-Nicolas-des-Romains, fief de la communauté des Lorrains. Il faut en effet rappeler qu’à cette époque, la Lorraine est encore indépendante de la couronne de France.

« Il n’y a pas quinze ans, beaucoup d’historiens d’art, et des meilleurs, ne voyaient dans ce nouveau venu qu’une sorte de mythe ».
Jacques Thuillier écrivait cette phrase en 1996, mais aujourd’hui, grâce aux expositions de Nancy et de Caen (*) et à l’ouvrage qui lui sont consacrés, on peut enfin prendre la mesure ce peintre remarquable.

(*) Caen, Musée des Beaux-Arts, du 21 septembre au 31 décembre 2007. L’exposition a été montrée auparavant à Nancy, Musée des Beaux-Arts, du 4 mai au 27 août 2007.

 Admiré de son vivant, il fut surnommé par les Italiens « le Lorrain », comme Claude Gellée, son ami de toujours. Lorrain donc, comme son contemporain, Georges de La Tour, il connut aussi un oubli inexplicable, de plus de trois siècles.

 Les véritables « enquêtes » menées par les plus grands historiens de l’art, Jacques Thuillier, Pierre Rosenberg, Sylvain Laveissière, Erich Schleier, puis Philippe Malgouyres, lui ont restitué de nombreux chefs-d’œuvre et ont redessiné sa carrière.

 Formé dans l’atelier de Simon Vouet à Rome, il commence une brillante carrière après le départ de son maître en 1627 : nobles, prélats de la cour pontificale et institutions religieuses sont ses commanditaires. Il fut préféré à Nicolas Poussin et Giovanni Lanfranco pour le décor de l’église Saint-Louis-des-Français de Rome et travailla au décor de la prestigieuse abbaye de Montecassino, des palais des princes Muti et Barberini à Rome…
Désormais, Charles Mellin occupe définitivement la place qui lui revient, celle d’une personnalité majeure de la peinture du XVIIe siècle.



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" Charles Mellin commence sa carrière à Rome à vingt ans
 En Italie, Mellin fréquente la colonie d’artistes français et se fait surnommer par les Italiens Carlo Lorenese, à l’exemple du nom donné à Claude Gellée (vers 1600-1682) dit le Lorrain (Claudio Lorenese). Avant même son départ transalpin, le peintre développe des accointances avec l’art italien.
 Formé en Lorraine chez Jean Lallement chez qui il entre en apprentissage en 1604, il a en effet l’occasion de découvrir une grande peinture du Caravage (vers 1571-1610), déjà célèbre, L’Annonciation, accrochée en 1609 à la primatiale de Nancy (aujourd’hui conservée au musée des Beaux-Arts) (photo ci-dessous)



L'Annonciation, Le Caravage MBA de Nancy


 Pourtant, Mellin paraît alors insensible au clair-obscur. Il ne le pratiquera qu’à la fin de sa vie en peignant à son tour une grande Annonciation, exécutée à Naples en 1647.


 Vers 1618-1619, le peintre se fixe donc à Rome et débute son parcours italien. Là, il rencontre
 Jacques Stella (1596-1657), Simon Vouet (1590-1649) auprès de qui il poursuit sa formation, et le sculpteur Jacques Sarrazin (1592-1660), avec qui il partage un logement. Il fréquente également des Italiens, dont Domenico Zampieri, dit le Dominiquin (1581-1641).
 C’est seulement après le départ de Vouet de Rome, en 1627, que la notoriété de Mellin prend de l’ampleur. Il obtient alors ses premières grandes commandes, notamment pour le couvent de la Trinité-des-Monts (voir photo ci-dessous), où il peint deux grandes lunettes à fresque. Il travaille ensuite chez le marquis Muti, pour qui il livre plusieurs compositions profanes destinées à orner les plafonds de son palais, et dont il forme le fils à la peinture.
 En 1631, Charles Mellin remporte son premier titre de gloire. En compétition avec Lanfranco et Poussin, il est choisi pour décorer la chapelle de la Vierge de l’église Saint-Louis-des-Français, en remplacement de Giovanni Baglione (1566-1643), atteint d’une maladie des yeux.
 Trois ans plus tard, il obtient son premier contrat pour travailler au décor de Montecassino, célèbre abbaye fondée par saint Benoît située entre Rome et Naples. Là, il livre un Sacrifice
 d’Abel (signé et daté de 1634) (photo ci-dessous) mais aussi plusieurs peintures pour la voûte de l’église. Les bombardements de 1944, lors de la célèbre bataille de Montecassino, ont malheureusement causé la perte de ce décor, qu’aucune photographie ne peut documenter.

À Naples, l’artiste est considéré comme un peintre « romain »
De 1642 à 1647, Mellin poursuit son voyage vers le sud et séjourne à Naples, où il retrouve son rival Lanfranco. Ces années napolitaines restent toutefois mal connues. Le Lorrain travaille alors dans l’entourage de la famille Barberini et surtout du cardinal Filomarino, nouvellement installé à Naples et détenteur d’une collection de peintures romaines.
 Mellin peint à Naples plusieurs décors et grands retables, dont celui de la Santissima Annunziata, brûlé en 1757. Considéré comme un représentant de l’école romaine, il est également appelé sur l’un des chantiers majeurs de la ville : celui de la chapelle du Palais Royal, où travaillent également Ribera et Lanfranco. Mellin y orne la voûte d’une grande fresque, vraisemblablement une Assomption, elle aussi victime de vicissitudes et entièrement détruite lors d’un tremblement de terre.
 En 1647, Mellin quitte Naples précipitamment. La ville est alors secouée par une révolte populaire menée contre le vice-roi et consécutive à l’instauration d’un impôt sur la vente des fruits. Le peintre regagne donc Rome, où il passe les dernières années de sa vie, jalonnées de nombreuses zones d’ombre. Il y meurt en 1649, sans jamais avoir regagné la Lorraine.
 La lecture de la biographie lacunaire de Charles Mellin soulève donc plusieurs interrogations. Outre le caractère peu assuré de son catalogue, en termes d’attributions et de datations, son travail pose la question de la validité de la notion des écoles nationales de peinture. Flamand d’origine – que lui resta-t-il d’ailleurs de sa culture septentrionale ? –, lorrain de naissance, Mellin fit toute sa carrière en Italie. Il fut même considéré, lors de son séjour napolitain, comme un brillant représentant de l’école romaine, maîtrisant parfaitement la technique de la fresque.
 Pourtant, comme en France, les histoires de l’art italien ont elles aussi oublié le Lorrain. À l’égal de Nicolas Poussin, qui lui fit longtemps de l’ombre dans l’histoire de la peinture, Mellin est pourtant un artiste que l’on serait tenté de classer dans la catégorie des peintres italiens. Après sa réhabilitation en France, celle-ci aura-t-elle lieu de l’autre côté des Alpes ?" (Le Journal des Arts 24 juillet 2007)




Charles Mellin- La Charité romaine Musée du Louvre



Charles Mellin
(Nancy 1597-1649 Rome)
Sainte Cécile,
huile sur toile, 75 x 57,5 cm, encadrée

Provenance :
Marché de l'art européen ;
Lieu d'acquisition par le propriétaire actuel

Nous remercions Francesco Solinas d'avoir suggéré l'attribution sur la base d'une photographie et pour son aide dans le catalogage de ce lot.

Dans ce tableau de Charles Mellin, Sainte Cécile est représentée en gloire, immergée dans des nuages dorés. À sa gauche, une viole de gambe moderne a été placée contre un orgue canterano que l'on voit à droite, tandis qu'une page de musique bien lisible a volé jusqu'au sol à ses pieds. Rappelant les reliefs sculpturaux romains et les inventions picturales de Poussin (1694-1665), un putto s'envole pour couronner la jeune Cecilia de fleurs et de la palme du martyr : un souvenir frais des génies classicisants qui peuplent les premières Bacchanales du collègue français de Mellin.

Solinas a daté cette œuvre entre 1630 et 1633 et elle était destinée à la dévotion domestique d'un collectionneur privé fortuné, comme on peut le déduire de l'abondante quantité de bleu aigue-marine appliquée sur la toile pour décrire le bleu magnifique et distinctif des vêtements de sainte Cécile. Cette petite toile de dévotion a probablement été peinte par Mellin peu de temps avant son Apollon qui se trouve aujourd'hui dans la collection Motais de Narbonne, à Paris.

Dans la présente composition, Mellin a repris la pose classique d'un personnage en prière, adaptée ici pour montrer Cécile les bras ouverts, tournés vers le ciel. La même pose se retrouve dans un dessin autographe d'une date légèrement postérieure, conservé au musée des Beaux-Arts de Rennes (inv. n° 794.1.3090). Il s'agit de l'Apparition du globe terrestre à saint Benoît, peinte par Mellin dans le cadre du cycle de fresques consacré à la vie du saint dans la basilique de Monte Cassino (1635-1637), détruite par la suite pendant la Seconde Guerre mondiale (voir P. Malgouyres, Mellin à Monteccassino in : Diaologhi di Storia dell'Arte, 4-5, 1997, pp. 196-205). La figure et l'atmosphère du présent tableau montrent également l'influence de Giovanni Lanfranco (1582-1647) et, comme nous l'avons déjà mentionné, de Nicolas Poussin. Ces influences sont également visibles dans d'autres œuvres de Mellin, comme l'Assomption de la Vierge peinte au début des années 1630 et actuellement conservée au Museo de Arte Ponce, à Porto Rico, tandis qu'une autre comparaison peut être faite avec le Saint Étienne en prière du Palais royal de Madrid (inv. no. 10141865, voir Gonzalo Redìn Michaus (ed.), Da Caravaggio a Bernini. Capolavori del Seicento italiano nelle collezioni Reali di Spagna, catalogue d'exposition, Milan 2017, pp. 174-177, cat. no. 18).
 
Charles Mellin a suivi sa formation initiale à Nancy vers 1610-1615 dans l'entourage de Jacques Bellange (1575-1637), l'un des artistes les plus raffinés actifs à la cour du duc Charles III de Lorrain durant le dernier quart du XVIe siècle. Comme d'autres peintres recommandés par la cour de Nancy à Christina de Lorrain (1565-1637), la grande-duchesse de Toscane, Mellin arrive à Florence en 1620, avant de se rendre à Rome et à Naples où il est actif entre 1622 et 1649 environ. Carlo Lorenese", comme on l'appelait en Italie, a atteint l'apogée de sa carrière à Rome sous le pontificat d'Urbain VIII Barberini. Drouot  Vienne 25 oct 2023



Charles Mellin- L'amour et la fidélité



Charles Mellin- L'Assomption de la Vierge (Porto Rico)



Attribué à Charles MELLIN (1597 - 1649) Saint Diacre martyr ou saint Etienne
 Cette toile est très proche des deux saints diacres martyrs (probablement Saint Abondance et Saint Etienne) de Mellin conservés au Palais Royal de Madrid et au Monastère royal de San Lorenzo de l’Escurial (deux versions du second sont connues, une au musée des Beaux-arts de Valenciennes et l’autre, coupée à mi-buste en collection particulière à Rome ; voir Phlippe Malgouyres, catalogue de l’exposition Charles Mellin un lorrain entre Rome et Naples, Nancy et Caen, 2007, p. 142 à 145) et proche aussi d’autres peintures du peintre lorrain actif en Italie (le visage de saint Dominique par exemple, op. cit. p.100).




Charles MELLIN (Nancy 1597 - 1649 Rome) "Le martyre de Saint Sébastien" Plume et encre brune, lavis brun et rehauts de gouache blanche 12 x 15,5 cm.
7800€ Albi le 24/02/2024

La première marque d’intérêt véritable pour cet artiste est due à l’érudition provinciale. Tout comme Georges de La Tour, Charles Mellin fut oublié pendant trois siècles. On sait que l’initiative des recherches sur Georges de La Tour revient à l’architecte lorrain Alexandre Jolly qui lui consacré une étude documentée dès 1863. De la même manière, c’est Lucien Wiener, conservateur du Musée Lorrain de Nancy, qui, dès 1903, publie la première brochure sur Mellin. Elle concernait l’identification d’un portrait censé représenter Claude Gellée.


Durant la persécution de Dioclétien (4ème siècle), il est pourtant exécuté sur ordre des souverains pour avoir soutenu ses coreligionnaires dans leur foi et accompli plusieurs miracles. D'abord attaché à un poteau et transpercé de flèches, il est finalement tué à coups de verges après avoir miraculeusement guéri la première fois.



Charles Mellin- Saint François-de-Paule aux pieds de Sixte IV (vers 1629)

MBA de Tours

Plume et encre brune, lavis d'encre de Chine sur papier vergé blanc



Saint-François de Paule en audience de Sixte IV avant son départ pour la France

(1629-1630; Cloître de la Trinité- des- Monts à Rome).



Le sacrifice d'Abel 1634
Source textuelle : Genèse4, 8-11 (Bible de Jérusalem, p. 43)
MBA de Nancy



L'Annonciation, Cabinet des dessins du Louvre
 Plume et lavis de bistre




Science des couleurs, énergie des compositions

Maître du dessin et de la couleur auprès des fils du marquis Muti Papazzurri, Mellin nous laisse tout d’abord la preuve de son évidente assimilation de la manière de Simon Vouet. Mouvement et ductilité des drapés, audaces caressantes des couleurs, comme l’affirme son Apollon ci-dessus (collection particulière). Dans sa Lapidation de Saint-Etienne voir  le mouvement de la composition, l’audace est parfois confuse. C’est là que la différence avec Poussin se mesure. (Nancy, Musée des Beaux-Arts du 4 mai au 27 août 2007)



Le martyre de Saint Etienne

Attribué à Charles Mellin



Charles Mellin
Nancy 1597 - Rome 1649, 72x56 cm, "Santa Cecilia", huile sur toile
8000€ Rome le 21/03/24


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Roger Marage (Pont-à-Mousson 1922- Sainte-Anne-d'Auray 2012)

Peintre et graveur

Artiste mussipontain, il s’inscrit rapidement dans la lignée des grands graveurs lorrains.

Une touche dense comme griffée

Photo issue de la fondation Taylor, hommage à Roger Marage

Roger Marage  est reconnu comme l’un des plus grands graveurs lorrains du XXe siècle et s’impose en outre comme l’un des graveurs sur cuivre les plus représentatifs de la gravure figurative de son époque.

«Après des études à l’école des Beaux-Arts de Rennes, sous la houlette de Mathurin Méheut, il entre à l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris en 1946 où il y enseignera par la suite jusqu’en 1982.
 
Il s’adonne avec une grande virtuosité à l’eau-forte et au burin sur cuivre, rehaussant ses œuvres de traits d’encre de Chine. Son travail est rapidement salué par ses pairs, et de nombreuses fois récompensé notamment par le Grand Prix des Beaux-Arts de la ville de Paris en 1954 et le Grand Prix Baudry de la gravure, décerné par la Fondation Taylor en 1990.

 Son style, si spécifique, vif et énergique, s’adapte magnifiquement à ses sujets où prédominent les paysages, notamment la campagne lorraine et l’architecture. Plus rarement, il croque des scènes de genre : dîner mondain, soirée « aristocratique »… où le dandysme de rigueur transparaît non sans ironie.
 Très attaché à sa ville d’origine, il réalise de nombreuses gravures mettant en scène les principaux édifices mussipontains, mais aussi, dans les années 60, des cartes de vœux pour les fonderies de Pont-à-Mousson.

Il met également son art au service de la bibliophilie en illustrant des ouvrages ancrés dans la culture lorraine : La Colline inspirée de Barrès, et Les Œuvres du Roi Stanislas . En 1973, la Société Godefroy Engelmann et la Bibliothèque municipale de Mulhouse présentent une rétrospective de « l’œuvre gravée de Roger Marage ». Plus récemment, en 2009, le Musée au Fil du Papier, à Pont-à-Mousson, lui consacre une grande exposition suite à une généreuse donation de l’artiste : 70 pièces sont alors présentées au grand public.
Aujourd’hui, près de 20 musées français et étrangers conservent ses gravures.» (Anne D. - Bibliothécaire - Bibliothèques-Médiathèques de Metz)

Prix - Médailles
•1954 Grand Prix des Beaux Arts de la Ville de Paris
•1990 Grand Prix Baudry de Gravure de la Fondation Taylor
•2000 Prix de la gravure au salon organisé par la Société lorientaise des beaux-arts

Le village lorrain
Pointe-sèche, signée et numérotée

La récolte de pommes de terre en Lorraine

Procession en Lorraine

et

Chartreuse de Bosserville

Vue de la façade du Musée de Pont-à-Mousson "Au Fil du Papier"

L'artiste a fait dont au musée de sa ville natale d'un certain nombre d'oeuvres représentatives de son oeuvre

et

Château de Manonville

Encre de Chine

MARAGE. Gravure "Pont-à-Mousson".  27 x 33,5 cm

La récolte de pommes de terre en Lorraine

Pont-à-Mousson

Issu des Oeuvres du roi Stanislas : Dessins originaux et eaux-fortes 

LLes Œuvres du Roi Stanislas furent publiées en 1966 aux éditions Beaux livres grands amis, pour commémorer le bicentenaire du rattachement de la Lorraine à la France. Le choix des textes revient à René Taveneaux qui en signa aussi la préface, les eaux-fortes furent tirées par le pressier Serge Moreau et l’«Éloge de Roger Marage», est d’André Jacquemin.

Souvigny La Basilique Les Tombeaux Son Prieuré

Gouache signée Roger Marage 1943

"Nom d'un chien" vue depuis une fenêtre de l'Hôtel- de- Ville de Nancy


Place Stanislas

Le Palais du Gouverneur

 Cuivre encré après aciérage, accompagné d'une épreuve de la gravure signée dans la planche - Vers 1960-

MARAGE Roger (1922 – 2012), Place Stanislas à Nancy, eau-forte épreuve d'artiste, signée en bas à gauche dans la planche, titrée et contresignée dans la marge.
Dim : 11 x 14,5 cm

MARAGE Roger (1922 – 2012), nativité, eau-forte, épreuve d'artiste signée en bas à droite dans la marge

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Charles Mitté

Tapissier à la Cour de Lorraine, début 18ème siècle

Fabriques de tapisseries à Nancy 


Charles Mitté: Un des plus fameux artistes tapissiers de Lorraine. Garde-meuble et tapissier de S. A. R. le duc de Lorraine. Dès 1698, son nom commence à être mentionné. En 1700, il est chargé de la réparation de la tapisserie connue sous le nom de tapisserie de la tente de Charles le Téméraire.
Sa fille aînée épousa le 15/07/1709 à l'âge de 16ans Galli Bibiena premier intendant des bâtiments de sa majesté ducale architecte et décorateur de la salle de l'Opera et de la Comédie à Nancy.

Le brevet de tapissier de l'hôtel de Son Altesse Royale, daté de Lunéville, du 4 août 1698, mentionne la demeure de Mitté à Nancy. En 1703, il répare la tapisserie de l'Adoration du Veau d'or; en 1704 il fait semblable travail à de riches tapisseries ; en 1705 à celles du Serpent d'airain, faisant partie de l'histoire de Moyse.
En 1710, nous le voyons demander l'ascensement d'un terrain, sis à Nancy, pour y planter de la gaude (guède ou pastel) et autres herbes propres aux couleurs des teintures et soies pour les tapisseries de Son Altesse.

C'est en 1710 qu'il exécute des tapisseries dont il est l'auteur; il reçoit alors, en cette année, les paiements pour celle du siège de Bude, d'après le tableau de Du Rup, de celles des Conquêtes de Charles V et de celle dite des Douze mois de l'année.
Les Victoires de Charles V, reproduites par lui, en tapisseries, furent malheureusement brûlées lors de l'incendie du château de Lunéville en 1719.
Les cinq pièces connues sous le nom des Conquêtes de Charles V se décomposent ainsi :
La première représentait la ville de Bude.
La deuxième représentait le saccagement de Bude.
La troisième représentait la bataille de Mohatz.
La quatrième représentait la Transylvanie.
La cinquième représentait le triomphe de Charles V, toutes d'après les peintures de Guyon et Martin.


Sur les manufactures de haute et de basse lisse établies à Nancy aux 16, 17, 18ème siècles.

Dès le milieu du 16ème siècle, nous trouvons un tapissier attaché au service de la Cour de Lorraine, un certain Frantz et sa tapisserie sur "l’histoire de Moïse", tapisserie visible dans la salle d’honneur du palais ducal, dans la pompe funèbre de Charles III.
Sur cette "Histoire de Moïse" en neuf pièces, on voit les armoiries du duc François (1544-1545) et de sa femme Christine de Danemark (morte en 1590), ainsi que celles du duc Charles III (1545-1608) et de sa femme Claude de France (morte en 1575).
 

En 1597, René Foucot, tapissier, natif de Paris, se fit recevoir bourgeois de Nancy. En 1600-1601, M. de Lenoncourt, bailli de Saint-Mihiel, reçut une certaine somme en payement de 3835 fr. dépensés pour seize pièces de tapisseries de haute lisse, façon de Bruxelles, prises de lui pour l'ameublement du Palais ducal de Nancy.

Le début du 17ème siècle est marqué par des tentatives plus importantes.
Un plan de Nancy en 1611 porte cette mention: « Outre les arts spécifiez en ceste table, il y a aussi en ladite ville des architectes, tailleurs de diamantz, rubiz et pierreries, peintres, sculpteurs, statuaires, brodeurs et tapissiers de haulte lice fort expertz, qui ouvrent et besongnent en leurs maisons et logiz (les archives de Nancy par Lepage).

En 1613, le duc Henri " faict traicter, convenir et accorder avec Isaac de Hamela et Melchior van der Hagen, maîtres tapissiers, cy devant demeurant à Bruxelles, pour les faire venir avec six bons maîtres ouvriers tapissiers et leurs familles s'abituer et demeurer à Nancy pour y travailler de leurs artz, et leur donne pendant les six premières années qu'ils y demeureront, la quantité de cent resaux de blé froment, pour chacune d'icelles, pour leur donner tant plus moyen de résider audit Nancy".
Un traité est conclu, en 1616, avec Bernard van der Hameiden, tapissier des Flandres, pour introduire en Lorraine la manufacture de tapisseries et y faire venir et entretenir des maîtres et ouvriers; pour ce faire des paiements sont effectués de 1617 à 1621 où Bernard van der Hameidenest est cité avec diverses tapisseries comme étant le tapissier du duc Charles IV  (Lepage, archives départementales).

Des ordonnances interdisaient l’introduction en Lorraine des tapisseries flamandes (registre de 1616 à 1626).

L’Hôtel de Ville de la Ville-Neuve de Nancy était vers 1616-1625 la résidence assignée par le souverain de la Lorraine à ces auxiliaires recrutés, comme d'ailleurs partout à cette époque, dans le foyer par excellence de la tapisserie, les Flandres.

Plus tard, 2 janvier 1674, enfin, nous voyons un certain Jean Glo, tapissier, solliciter et obtenir la permission de travailler à Nancy, « en tapisserie de feuillage, aux offres qu'il a faits de faire meilleur marché de 6 gros par aune au moins que Jean François, aussi tapissier en cette ville »

 Vers la même époque, Louis XIV fait don au nouveau duc de Lorraine, qui vient de lui prêter hommage, d'une tenture de l'Histoire d'Alexandre, valant 25000 écus (Mémoires de Saint-Simon).

Citons encore une « Histoire de Scipion », en cinq pièces, exécutée à Bruxelles au 17ème siècle pour la cour de Lorraine. (Saint-Simon)

Les guerres qui signalèrent la fin du siècle n'étaient point faites pour favoriser le développement d'un art pacifique entre tous.
 Aussi n'est-ce qu'après le rétablissement du duc Léopold, après la paix de Ryswick (1697), que la tapisserie put reprendre son essor.

 Le 4 août 1698, un décret daté de Lunéville, nomme Charles Mitté  tapissier de l'Hôtel (le Palais des Ducs de Lorraine) puis vient, en 1701-1702, la promulgation d'un privilège pour l'établissement d'une manufacture de tapisseries à Nancy.


En même temps, les frères Nicolas et Pierre Durand obtinrent du duc, par lettres-patentes du 10 mai 1699, entérinées en la Chambre des Comptes le 5 octobre 1703, les greniers situés au-dessus de la Boucherie, pour y établir une manufacture de tapisseries de laine et de fil et autres, avec exemption et franchise.

 Charles Mitté, qui n'était guère connu jusqu'ici que pour avoir « dégraissé, remis en couleur et raccommodé une tenture de tapisserie de sept pièces de Flandres, conservée en la chambre du Conseil de ville joua un rôle prépondérant dans la direction de la nouvelle manufacture. Il sera en fait chargé par le duc Léopold de faire revivre l'art de la tapisserie à Nancy.

 En 1710, on le voit livrer trois tapisseries de haute lisse, représentant « le Siège de Bude », « les Conquêtes de Charles V » et les « Douze mois de l'année » en même temps, il prend à cens un terrain « pour y planter de la gaude et autres herbes pour faire des couleurs à teindre les laines et soies qu'il convient d'employer aux tapisseries ».

 En 1711, il reçoit un acompte sur le prix des tentures des « Victoires de Charles V sur les Turcs ». A ce document succède l’état de la livraison de toute l'histoire en tapisserie de Charles V, duc de Lorraine, et de trois pièces restant des dix-huit qui composent ladite Histoire, faites par Charles Mitté, sur les tableaux de Martin et de Guyon.


La série entière des « Batailles du duc Charles V » s’est retrouvée ensuite à Vienne, en compagnie de la presque totalité des tapisseries de la cour de Lorraine, par le mariage du duc François III avec l'impératrice Marie-Thérèse (1736). L'annuaire publié par les musées impériaux de la maison d'Autriche nous apprend que l'une des pièces  porte la marque C. M. E. (Charles Mitté), une croix lorraine, et la date NANCI, 1708. Il ajoute que la tenture (comprenant 24 pièces) a été exécutée à la Malgrange, près de Nancy.
 

Une autre pièce de la même suite, « la Délivrance de Vienne » porte la mention » FAIT A MALGRANGE EN 1724.

Charles Mitté invite plusieurs artistes de la manufacture des Gobelins, notamment Josse Bacor, afin de réaliser des tapisseries sur les modèles des dix-huit cartons de Jean-Baptiste Martin représentant "la grande tenture des victoires de Charles V, grand chef militaire (*), duc de Lorraine (1643-1690).

(*) En septembre 1683, avec le concours du roi de Pologne Jean III Sobieski, Charles V attaque et vainc les Turcs qui assiégeaient Vienne depuis deux mois. Il mène ensuite plusieurs expéditions dans la partie de la Hongrie occupée par les Ottomans, est victorieux au siège de Buda (1686) dont il s'empare, reconquiert la Hongrie, puis la Slavonie et la Transylvanie en 1687.

 Les peintres Jean-Baptiste Martin (**) et Jean-Louis Guyon de l’Académie de Saint-Luc, ont copié en grand, pour servir de cartons aux tapissiers, les tableaux peints par Charles Herbel (***). Ils ont été assistés dans cette tâche par les peintres du Rup et Claude Jacquart (Lepage 1852, le Palais ducal de Nancy).

(**) Jean-Baptiste Martin, surnommé « Martin des batailles » ou encore « Martin des Gobelins », est un peintre français né en 1659 à Paris où il meurt en 1735. Le duc Léopold Ier de Lorraine fait appel à lui. Il réorganise la manufacture de tapisserie de Nancy et réalise par ailleurs une série de vingt peintures consacrée à Charles V pour la galerie du château de Lunéville.

(***) Charles Herbel (Nancy 1656-Nancy 1702) est un peintre des batailles, de l’histoire, des portraits. Il suit le duc Charles V dans ses campagnes contre Louis XIV et travaille pour l’empereur du Saint-Empire Léopold 1er  à Vienne. Ses toiles sont exposées pour la première fois lors du retour du duc Léopold à Nancy en 1698 mais disparaissent dans l’incendie du château de Lunéville en 1719. Ces peintures ont servi heureusement comme carton pour les tapisseries

L'atelier de Charles Mitté est  installé dans le palais ducal, puis à la Malgrange; si les produits sont parfois imparfaits sur la période 1703-1711, ils deviennent  de grande qualité sur 1711-1718.

En 1717, Bacor, tapissier de haute lisse, exécute deux portraits du duc Léopold. Quant aux initiales S. M., elles désignent certainement Sigisbert Mangin ou Mengin, entrepreneur des tapisseries de S. A. R., fils du sieur Nicolas Mangin, bourgeois de Nancy, qui se maria le 20 août 1720, et qui, en 1722, prit  à cens « un terrain à gauche du chemin de Nancy à Bon-Secours, pour y construire une manufacture de tapisseries en basse lisse.

A côté des tapissiers spécialement attachés au service de la Cour, il faut citer les entrepreneurs particuliers par exemple les frères Nicolas et Pierre Durand (1699-1703). Par arrêt du Conseil, en date du 20 janvier 1715, ces artistes obtinrent une prorogation de vingt ans, mais sans privilège exclusif. Par d'autres patentes du 7 décembre 1725, ils furent confirmés dans la jouissance des bâtiments tout le temps qu'ils travailleraient à ladite manufacture. Le duc de Lorraine François III, enfin, confirma leurs privilèges, aux mêmes conditions, par deux arrêts en date des 19 mars 1731 et 20 septembre 1736.
 

En 1732, Nicolas Durand fit aux autorités une fourniture de tapisseries provenant de sa fabrique.

La fin de la dynastie de Lorraine est marquée par un redoublement d'activité.
 

En 1726, Germain, tapissier, reçoit le prix du raccommodage de quatre pièces de tapisseries de "l’Histoire de Saint-Paul"
En 1728, Poix, père et fils, et Lecoq, tapissiers, figurent dans les registres pour avoir raccommodé des pièces de tapisseries représentant Achille et Romulus.
 Entre 1730 et 1733, les Jésuites de Nancy achètent 103 aunes de tapisseries fabriquées dans la ville.

 Le 2 juillet 1734, des lettres patentes autorisent Jean Bellat, marchand tapissier d'Aubusson, à établir à Nancy une manufacture de tapisseries de haute et basse lisse, et lui accordent gratuitement « trente arbres chênes dans les bois de la gruerie de Nancy, pour la construction des métiers qui lui sont nécessaires »

  Quelques années auparavant, le garde-meuble de la maison de Lorraine s'était enrichi d'une suite précieuse de Représentations mythologiques, en huit pièces, d'après Coypel, données, le 4 février 1730, par Louis XV au duc François III.

Si la prise de possession par le duc François III  de son nouveau duché, la Toscane (1737), porta un coup fatal à l'antique manufacture de tapisseries de Florence, créée près de deux siècles auparavant par les Médicis, en revanche, la renonciation de ce prince à ses Etats héréditaires semble n'avoir que développé son attachement pour ses anciens sujets. On en jugera par le fait qu'une des premières mesures de François III fut de fermer, l'année même de son avènement, la manufacture médicéenne.
On pouvait croire l'art de la tapisserie à jamais banni de Florence, lorsque, vers 1740, le même prince fit reprendre les travaux sous la direction du peintre Lorenzo Corsini seulement, cette fois, des tapissiers lorrains avaient remplacé, sur presque toute la ligne, les tapissiers italiens.
En 1742, les métiers de haute lisse établis à Poggio Impériale, près de Florence, sont tous entre les mains de Lorrains. Ce sont des Lorrains également, Roch le jeune et Charles Depoix, qui s'occupent, au Palais Vieux, des travaux de rentraiture. Deux Lorrains enfin, Alexandre Germain  et Joseph Vauthier, président à ces différentes entreprises avec le titre de chefs du Garde-meuble.
En 1744, les ateliers furent de nouveau fermés, et personne depuis n'a songé à les rouvrir.

Quand Stanislas Leszczinski (1737-1766) prend possession du trône,  la manufacture des Durand est toujours en pleine activité. Pierre étant mort, François, fils de Nicolas, lui succède. Nicolas meurt à son tour en 1755, à l'âge de 91 ans. Son acte de décès nous apprend qu'il était natif de Nancy, paroisse de Saint-Sébastien. A côté de François Durand, nous trouvons son gendre et associé, Sigisbert Mathieu.
 

En 1766, les chefs de la manufacture, inquiétés par les teinturiers, qui avaient obtenu, en 1762, des privilèges spéciaux, réussirent à faire confirmer les arrêts antérieurs,  par eux "pour jouir des privilèges, franchises, exceptions et immunités attachés à ladite manufacture de tapisseries, tours de lit et bergames de laine, tant et si longuement qu'ils la feront travailler par eux-mêmes, avec permission de teindre les laines et fils qu'ils emploieront dans leur manufacture".
 

En 1782, voilà comment on caractérise  les productions de l’établissement fondé par les Durand « Nancy a une manufacture privilégiée de tapisseries de laines du pays. Elles ne manquent ni de goût ni d'agrément elles sont de grande durée et d'un prix modique. Nos pères les estimaient beaucoup, s'en étant contentés pendant longtemps. J'ignore s'il y en a jamais eu d'exportation; mais je suis étonné qu'on en voye si peu dans la province, où il n'en manque pas de plusieurs sortes, comme bergames, points de Hongrie, verdures, hautes et basses lices de France, de Beauvais et de Bruxelles et enfin des Gobelins. Il est à souhaiter que le goût se porte davantage sur cette manufacture, que l'aisance, généralement répandue, en rende la consommation plus considérable »
Les tapisseries de laine et fil, sorties de la manufacture des Durand, furent presque les seules employées pour la décoration des appartements, et même par les seigneurs dans leurs hôtels et leurs châteaux, jusque vers le milieu du siècle; alors, les tentures de  Flandres et d'Aubusson prévalurent dans la décoration des appartements des personnes riches, tandis que celles de Nancy furent réservées à la bourgeoisie, qui n'en possédait pas auparavant (Lionnois).

En 1779, on constate que la manufacture nancéienne avait beaucoup perdu de son activité.
A la même époque, en 1779-1780, nous voyons encore confirmer l’ acensement du bâtiment situé au-dessus des grandes Boucheries de la Ville- Neuve de Nancy, servant à la manufacture de tapisseries puis on perd de vue cet établissement, qui, certainement, ne survécut pas aux orages de la Révolution. (Lepage)

L'état des arts, métiers et professions et indication du nombre des personnes qui les exerçaient en l'an IX n'indique plus, pour le département de la Meurthe, que treize maitres tapissiers et deux compagnons, et encore faut-il comprendre, dans ce nombre, des artisans qui n'avaient rien de commun avec les basse ou haute lisses.
 

Que reste-t-il, aujourd'hui, de la production si considérable des ateliers nancéiens ? Où trouve-t-on les pièces réalisées à Nancy ?

Bibliographie: Lionnois, Lepage, les fabriques de tapisseries de Nancy 1883, par  Eugène Müntz (1845-1902)


 Musée d'histoire de l'art de Vienne, Collection d'armes et d'armures (Neue Burg). Tapisserie de la série des Victoires de Charles V duc de Lorraine, aux armes de Léopold Ier duc de Lorraine et de son épouse Élisabeth-Charlotte d'Orléans, tissée pour Léopold Ier duc de Lorraine, à la manufacture de Charles Mitté à Nancy / La Malgrange.


Manufacture de Charles Mitté

Tissés de fils d'argent, de laines et de soieries en métal argenté représentant

«La victoire de l'archiduc Joseph à Landau en 1702»,


avec les figures montées de l'archiduc Joseph et du margrave Louis Guillaume de Bade au centre, suivies d'autres officiers à cheval, devant eux de Mélac, à l'arrière-plan, d'autres troupes et la ville assiégée de Landau, entourées d'une bordure représentant des aigles à deux têtes stylisées, centrées sur le bas avec une plaque portant l'inscription «JOSEPHUS ROM REX LAUDAVIUM ARCEM MUNITISSIMAM EXPUGNAT ET GALLIS DIE 10. SEPTEMB. ANNO 1702. Sur  les côtés  des bordures de colonnes architecturales avec des caryatides vêtues de vêtements turcs surmontant des trophées militaires.


GBP 103,250 en 2008 chez Christie's


Une exceptionnelle tapisserie des ateliers de La Malgrange
vendue à Londres chez Christie's le 6 novembre 2008

par
Nicole de Reyniès, conservateur général du patrimoine
 
Février 2009
Une tapisserie issue d’un atelier de Lorraine est passée en vente le 6 novembre 2008, à Londres chez Christie’s, sous le numéro 581 du catalogue.
Il s’agit d’une pièce d’une qualité exceptionnelle tant par son dessin et son sujet que par ses dimensions et son état de conservation. Cette tapisserie n’a malheureusement été acquise ni par un musée de Lorraine (Nancy, ou Lunéville où cette pièce aurait été particulièrement bienvenue) ni par une autre collection publique française, mais par un marchand.
La scène offre au premier plan une frise de cavaliers dont l’un, somptueusement vêtu, reçoit l’hommage d’un homme non moins élégant mais à pied. Dans le lointain apparaît une ville cernée de remparts située en plaine, entre une rivière et des montagnes. Entre ces plans, circulent des hommes et du matériel militaire.
Comme l’écriteau en latin dans la bordure inférieure le précise , elle figure la Victoire de l’archiduc Joseph à Landau le 10 septembre 1702 sur les Français.
L’archiduc d’Autriche, Joseph (1678-1711), roi de Hongrie en 1687, roi des Romains en 1690, empereur du Saint Empire Romain Germanique (Joseph 1er) en 1705, prit en 1702, avec le Prince Louis 1er, margrave de Bade, général commandant l’armée impériale, la citadelle de Landau (en Allemagne) aux Français , dans le contexte de la guerre de Succession d’Espagne que Joseph menait au profit de son frère Charles . Le gouverneur de la citadelle était le Comte Ezéchiel de Mélac, lieutenant général des armées du Roi de France.
Elle ne porte pas de marque de fabrique, mais son tissage en Lorraine est assuré puisqu’elle porte la même bordure que celle de la célèbre tenture tissée pour Léopold (1679-1729), duc de Lorraine et de Bar, dont les pièces illustrent les Victoires de Charles V , son père (1643-1690), sur les Turcs . Or cette tenture des Victoires a été tissée à Nancy dans l’atelier de Charles Mité, tapissier de la cour du duc depuis 1698. Cet entrepreneur avait recruté pour ce faire nombre de lissiers dont certains ayant reçu une excellente formation aux Gobelins à Paris.
La tenture des Victoires de Charles V ayant été tissée de 1708 à 1718, il est tentant de proposer les mêmes dates pour la Victoire de l’archiduc Joseph. Mais le modèle de bordure pourrait cependant avoir été réutilisé après cette date.
Le dessin de la pièce en vente s’avère très proche de ceux des dix-huit pièces de la tenture des Victoires de Charles V. Or le dessinateur de cette tenture des Victoires est connu : il s’agit de Jean-Baptiste Martin (1659-1735), élève de Adam-François Van der Meulen. Ce dernier travaillait auprès du peintre Charles Lebrun pour établir les maquettes et cartons des tentures destinées à être tissées aux Gobelins à l’usage de Louis XIV. J.B. Martin était spécialisé dans les scènes de batailles et les vues de vastes sites. De nombreuses toiles de cet artiste figurent au château de Versailles, quelques-unes au musée de Marly. Martin fut assisté du peintre Jean Louis Guyon .
A la différence de la tenture des Victoires de Charles V qui porte sur la bordure supérieure les armes de Léopold et de sa femme Elisabeth-Charlotte d’Orléans, cette tapisserie ne porte pas d’armoiries. On ne sait donc qui la commanda. Mais il est évident que le commanditaire ou le destinataire était un personnage de haut rang étant donné le coût d’une telle pièce. La manufacture aurait-elle pris l’initiative du tissage en espérant vendre la pièce à Joseph 1er ? Mais alors elle aurait eu à en commander le dessin au peintre… Ce qui paraît une hypothèse peu probable. Pourquoi la pièce n’offre-t-elle pas d’armoiries ? Ont-elles été supprimées ? Toutes ces questions sont à résoudre.
Il n’en reste pas moins que la qualité du dessin est impressionnante et le tissage d’une grande finesse. L’état de la pièce est également surprenant. Il serait peut-être encore possible d’acquérir cette oeuvre rare, le marchand étant connu sur la place de Paris….
Notons que les tapisseries tissées en Lorraine appartiennent pour la plupart à des collections publiques étrangères (Vienne, Budapest, Saint-Pétersbourg…) et que les occasions d’achat sont rarissimes…

Nicole de Reyniès
Conservateur général du patrimoine h.
le 18 février 2009


Détail de la tapisserie précédente


Cette tapisserie représente Charles V pendant la bataille de Bratislava contre les Turcs, le 29 juillet 1683, avant le siège de Vienne.Laine et soie, 430 x 805 cm Tapisserie faite à Nancy La Malgrange, comme d'autres déposées également à Vienne.(doc Alamy)


Autre tapisserie des Conquêtes de Charles V

Prise de  Szeged sur les turcs en 1686. Tapisserie commandée par l’empereur Léopold 1er après la prise de Szeged (Musée de Vienne)

Manufacture de Charles Mitté


Le pillage et le sac de Bude, 2 sept 1686

Tapisserie de basse lice, soie et fils métalliques 1703-1705

par Charles Mitté, Atelier de la Malgrange

Réalisée dans un atelier situé au Palais Ducal d'après un tableau de Charles Herbel

Palais des Ducs de Lorraine, Nancy


Buste et gravures représentant Charles V

(Gazette Drouot 2019) Le Buste de Charles V, Duc de Lorraine par Rémy-François Chassel (Nancy, vers 1665 - Nancy 1752)
France, époque Louis XV Marbre blanc
H. 57 cm, L. 45 cm, P. 24 cm

Exposition :
L’oeuvre a été présentée à l'exposition Turqueries et autres chinoiseries. L'exotisme en Lorraine au XVIIIe siècle, qui s'est tenue au Château de Lunéville du 6 juin au 21 septembre 2009.
La fiche descriptive de cette sculpture a été rédigée par le Professeur François Souchal
Charles V, duc de Lorraine (1643-1690), dans l'impossibilité de prendre possession de son duché, occupé par les troupes de Louis XIV, vécut à la Cour de Vienne.
Beau-frère et ami de l'Empereur Léopold, il se distingua à la tête des armées impériales dans les combats de défense contre les Turcs, qu'il vainquit aux portes de Vienne, et dans les batailles de Buda et de Mohács. La paix de Ryswick rendit le Duché de Lorraine à son fils Léopold, qui y régna de 1698 à 1729, grand prince constructeur et ami des arts. Ce n'est pas lui, mais son fils et successeur, François, futur époux de Marie-Thérèse de Habsbourg et Empereur, qui commanda en 1731 à Rémy François Chassel les bustes rétrospectifs de son grand-père Charles V et de son père. Notre buste n'est donc pas un portrait ad vivum.

Rémy François Chassel est un des meilleurs sculpteurs à la Cour de Léopold. Il appartenait à une famille de sculpteurs lorrains, originaire de Rambervillers, dans les Vosges, dont il est difficile de dresser la généalogie. D'après Dom Calmet, dans son Histoire de Lorraine, il aurait enrichi sa formation à Paris dans l'atelier de Louis Lecomte avant d'être nommé directeur de l'Académie ducale de Peinture et de Sculpture de Nancy. Il reçut des commandes pour l'Opéra et l'Hôtel de ville de Nancy, pour des églises (notamment Saint-Sébastien de Nancy), pour le château ducal de Lunéville et ses jardins et enfin de nombreux monuments funéraires.
Son buste montre l'influence française dans le duché voisin de Lorraine. Le traitement de la grande perruque louisquatorzienne et du modelé sensible du visage rappelle l'art de Coysevox. Il réussit à donner à son personnage un air très vivant d'une certaine morgue, décelable dans l'expression des yeux et la moue de la bouche. Le buste est coupé sans les épaules. Sur les rubans qui décorent le vêtement, on voit sur le côté une croix potencée et sur le devant les alérions des armoiries de Lorraine de part et d'autre de la croix de Lorraine à deux branches.
L'ouvrage témoigne de la qualité des artistes que le duc Léopold avait su rassembler pour affirmer, comme Louis XIV, la grandeur de son règne, dans son État encore indépendant, limitrophe du royaume de France, mais qui s'avouait largement tributaire de l'art de Versailles et de Paris. Dans ses Mémoires pour servir à l'histoire des hommes illustres de Lorraine,François Antoine Chevrier, en 1754, vantait le «ciseau mâle et hardi» de Chassel et ajoutait qu'il excellait dans les bustes.
Professeur François Souchal

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Au Musée de Nancy, la tenture de  "la condamnation de banquet"

Entrée dans les collections du musée en 1861, cette tenture était réputée, au XIXe siècle, provenir des collections du dernier duc de Bourgogne Charles Le Téméraire dont elle aurait orné la tente lors de la bataille de Nancy, en 1477. Elle fut en réalité commandée aux ateliers tournaisiens par le duc Antoine de Lorraine et installée, en 1511, dans la grande salle du palais ducal. Elle constitue aujourd’hui le seul exemple de mobilier d’origine du palais de la Renaissance avec le lit du duc Antoine et de la duchesse Renée de Bourbon. (Musée de Nancy)


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Autre recherche à partir de l'initiale du nom de l'artiste:

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